Arcadia de Lauren Groff

Après une très plaisante lecture du premier roman de Lauren Groff, Les monstres de Templeton, j’avais bien envie de retrouver cette jeune auteur américaine. La parution d’Arcadia m’en a donné l’occasion mais force m’est de reconnaître que je n’ai pas éprouvé le même plaisir, très loin de là. Le sentiment dominant fut l’ennui malheureusement, l’absence d’intrigue  minant peu à peu mon intérêt.

Le lecteur suit Pouce, depuis ses premières années au sein d’une communauté jusqu’à l’âge adulte, la paternité et la disparition de sa mère. Pouce est un signe, un espoir : premier enfant vraiment né durant l’expérience communautaire, il porte en lui tout ce que pourrait être Arcadia : la liberté, l’épanouissement, la générosité, la disponibilité. Dans les années 60 aux États-Unis, bien des gens se sont regroupés pour fuir le capitalisme et la société de consommation. Vivre ensemble pour vivre mieux et vivre libre, sans contrainte, le rêve a attiré bien des idéalistes. Les parents de Pouce y croient, ils travaillent, souvent beaucoup, pour que la communauté soit auto-suffisante. Il faut quand même un peu d’argent, pour ce qu’on ne peut pas produire : c’est la vente d’herbe, la meilleure du coin qui permet de survivre, de manger. Mais il fait quand même souvent froid et faim, la mère de Pouce est dépressive et son père bientôt se retrouve en fauteuil roulant.

Dans la première partie Pouce a cinq ans, dans la seconde quatorze et c’est le moment où la communauté doit se séparer car elle compte trop de membres extérieurs qui sont autant de parasites profiteurs et qu’il n’y a pas d’autorité pour gérer vraiment les dépenses et les ambitions personnelles de chacun qui émergent finalement. L’autorité c’est la contrainte, une atteinte à la liberté, tout ce qu’ils ont fui.

Pouce à quatorze ans va pour la première fois découvrir le monde extérieur qu’il n’a jamais vu. Mais la troisième partie nous montre un Pouce de trente-cinq ans, on ne saura donc pas grand-chose de l’immersion totale et soudaine dans le monde du dehors du Pouce adolescent, ce qui est assez frustrant.  Pouce devenu Ridley a dû se construire sur les ruines d’un rêve mais ce cheminement n’est pas suivi. Sa vie avec Helle, une ancienne de la communauté, est évoquée et non racontée ce qui n’est pas suffisant à mes yeux pour embrasser vingt ans de vie, vingt ans d’une adaptation à la vie moderne et trépidante qui a dû être difficile.

Les deux premières parties sur la vie dans la communauté sont réussies car elles racontent sans juger un beau rêve et expriment sans être démonstratives ni moralisatrices les failles, les contradictions qui ont conduit à l’échec. On suit Pouce qui essaie de comprendre son monde, se réfugie dans les contes, s’imagine en héros. Le fil narratif repose sur ce seul personnage et son environnement, à l’image d’un roman d’apprentissage. Mais dans les parties suivantes, l’intérêt porté au jeune Pouce n’est plus, le récit se fait monotone, à son image.

On est très loin de la drôlerie et de l’ambition romanesque qui m’ont emportée dans Les monstres de Templeton.

Lauren Groff sur Tête de lecture

 

Arcadia

Lauren Groff traduite de l’anglais par Carine Chichereau
Plon (Feux croisés), 2012
ISBN : 978-2-259-21066-9 – 325 pages – 22 €

Arcadia, parution aux États-Unis : 2011

31 Comments

  1. Les monstres de templeton m’attendent patiemment, donc pour Arcadia, pas de souci! Un recueil de nouvelles de l’auteur existe, qui déjà avait moins plu, je crois.

  2. Bon, moi c’est « les monstres de Templeton » que j’ai dans ma Pal, donc je commencerai par là…
    Dis donc, tu avances vite, plus que 139 titres à lire… 😉 !

      1. Ah non, ce n’était pas une moquerie, loin de là ! 5 titres de tes 144 « 12 d’Ys » sur un mois, je trouvais que ça méritait un encouragement car tu es loin de ne lire que dans ta liste 😉 !

  3. comme, depuis que je me suis fabriquée une liste sur mon bloc note , j’ai 10 titres en attente, je vais zapper celui-là , pourtant le sujet me plait bien merci YS
    Luocine

  4. Du coup j’ai très envie de lire Les Monstres de Templeton ! Désolée que cet écrit ne soit pas dans la lignée du premier roman que tu avais lu; c’est toujours décevant de découvrir un auteur, de l’apprécier puis d’être déçu par les écrits suivants…

  5. J’ai beaucoup aimé les nouvelles de Lauren Groff (Fugues) mais pas encore craqué pour Les monstres de Templeton, qui sera donc mon prochain de l’auteur… Oublions Arcadia !

    1. Oh, je ne lancerais pas ce mot d’ordre, les précédentes lectrices ont aimé, je dirais juste qu’il faut s’attendre à un roman vraiment différent, beaucoup plus lent et dépourvu d’humour…

  6. J’ai hésité à choisir ce titre-ci à la dernière opération Masse Critique de Babelio et finalement j’ai préféré opter pour « Les filles de l’ouragan », le dernier Joyce Maynard.
    L’avenir me dira si j’ai fait le bon choix 😉

  7. Je l’avais noté car j’avais aimé Les monstres de Templeton et que les avis étaient positifs mais là, tu calmes un peu mon envie ! Le côté « communauté » m’intéresse bien mais vu ce que tu en dis, j’ai peur de finir par m’ennuyer (surtout qu’en ce moment, il ne m’en faut pas beaucoup pour attirer mon attention ailleurs !)

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