Mortelle Ecosse de Stuart MacBride

Dans le premier tome de ses aventures, l’inspecteur chef Logan McRae apparaissait comme un héros, même s’il n’en avait pas la stature : de retour au boulot après avoir été blessé dans l’exercice de ses fonctions, c’était la gloire ou peu s’en faut. Mortelle Ecosse débute sous des auspices biens différents. D’abord, on est en été. Ça ne se voit pas forcément tout de suite car bien sûr, il pleut sur Aberdeen, mais on croise quand même quelques tee-shirts et un ou deux nombrils dénudés. Ensuite, McRae est relégué dans « l’équipe des branleurs », dirigée par l’inspecteur Steel. Il a en effet mené une opération au cours de laquelle un agent a été gravement blessé et se trouve entre la vie et la mort. Finis donc les temps héroïques, il va falloir faire profil bas.

Six squatteurs viennent de périr dans un incendie criminel ; une prostituée tabassée à mort est retrouvée nue dans une rue d’Aberdeen ; c’est dans une valise qu’est découvert le tronc d’un chien, largement en décomposition. L’incendie est une affaire très médiatique, impossible de la confier à l’équipe des branleurs. C’est de la prostituée assassinée que McRae va se charger, allant jusqu’à faire ramasser les préservatifs usagés trainant dans la rue. Et il y en a beaucoup. Un suspect est rapidement arrêté, tout ça semble bien simple, et l’inspecteur Steel se pavane, au grand agacement de McRae. Mais une deuxième prostituée portée disparue est retrouvée morte, puis une troisième, tandis que la tension monte entre McRae et sa chef qui le fait travailler quasi jour et nuit. Ça n’est pas comme ça qu’il va réussir sa vie de couple avec l’agent Watson qui a emménagé chez lui trois mois plus tôt…

Stuart MacBride n’est pas très connu en France. La série des enquêtes de l’inspecteur Logan McRae a commencé à être traduite par Michel Lafon mais s’est arrêtée après deux volumes, dommage. Il a été pourtant question il y a peu de cet auteur, puisqu’il s’agit de l’un de ceux que Roger Ellory a dénigré sur Amazon et sous pseudo. Pratique condamnable que ne mérite pas l’auteur écossais tant il donne chair et vie à la troisième ville d’Ecosse, une des plus riches du Royaume-Uni. Mais McRae n’est pas Colombo et ce n’est pas dans les hautes sphères qu’il investigue mais bien dans les rues crasseuses.  Il est d’ailleurs comique de lire la postface de l’auteur dans laquelle il remercie l’office du tourisme d’Aberdeen de ne pas l’avoir lynché suite à la parution de son premier roman… Il faut bien dire qu’à l’issue de ces lectures, on n’a pas franchement envie d’y passer des vacances.

Comme souvent dans ce genre de romans, l’enquête est prétexte à dénoncer la corruption des pouvoirs publics. Il s’agit ici d’immobilier, dont les promoteurs aux dents longues n’hésitent pas à se lier aux trafiquants de drogue  et à la prostitution. Intimidation, chantage, violence : rien n’est épargné à la population. Face au meurtre organisé, la police ne semble pas de taille, surtout pas l’équipe des branleurs. Rien n’est fait selon la procédure et l’inspecteur Steel apparait comme franchement antipathique : extrêmement vulgaire, elle ne respecte personne, pas même ses collègues, insulte tout le monde et n’a aucune considération pour les témoins et les victimes. Elle est détestable et donc parfaitement réussie.

Logan McRae ne l’est pas moins car à travers lui, c’est le quotidien d’un inspecteur qu’on suit pas à pas, dans sa vie professionnelle et quotidienne, dans ses intuitions les meilleures comme dans ses ratages. Par conséquent, on n’est pas là dans un roman d’action où les rebondissements succèderaient aux coups de théâtre. L’ambiance est beaucoup plus intimiste et personnelle, voire même lente parfois. Et rien à la gloire des services de police : les « jeux » auxquels se livrent les agents en planque pour passer le temps sont aussi débiles que vulgaires.

Stuart MacBride donne, on l’aura compris, dans le réalisme sans fioritures, au détriment du rythme narratif, parfois lent. L’intrigue est cependant très bien tricotée et l’ambiance vraiment réussie, sans grand renfort de couleur locale.

Stuart MacBride sur Tête de lecture

 

Mortelle Ecosse

Stuart MacBride traduit de l’anglais par Bernard Ferry
J’ai Lu, 2009
ISBN : 978-2-290-01729-6 – 442 pages – 7.60 €

Dying Light, parution en Grande-Bretagne : 2007

13 commentaires sur “Mortelle Ecosse de Stuart MacBride

  1. Je ne connaissais pas l’auteur et n’étais pas au courant de cette affaire avec Ellory. Cela me le rend moins sympathique qu’il ne l’était à mes yeux…

    1. Ah Kathel, je ne savais pas que tu vivais dans un désert sans le moindre accès à l’information 😀 Cette « affaire » Ellory a fait un peu de bruit dans le Landerneau du polar, et sur la validité des chroniques genre Fnac et Amazon. J’aime beaucoup, beaucoup les romans d’Ellory, j’en ai encore un dans ma PAL que je compte bien lire sous peu. Mais de cette histoire, il ne sort pas grandit : qu’il poste sous pseudo des avis dithyrambiques sur ses livres passe encore, mais qu’il dérouille ceux des autres, c’est carrément salaud. Surtout que ce sont ses compatriotes et qu’il peut donc leur dire en face ce qu’il pense de leurs bouquins… et je ne vois pas bien comment le fait que Stuart MacBride vende des livres peut nuire aux ventes d’Ellory. Ceci dit, certains festivals qui l’avaient invité ont repris leur invitation : cette histoire va loin…

  2. Je ne connaissais pas le fameux Ellory dont tu parles, et en voilà un que je vais rayer de ma PAL à venir ! Cela sera toujours un auteur en moins… Si ses écrits sont à la hauteur de son courage…
    Mais pour en revenir au livre dont tu parles, il me tente bien ce polar, d’autant que j’ai un faible pour l’Ecosse 🙂

    1. Tu ne peux pas ne pas connaître Ellory, il est question de lui partout sur les blog… Et loin, très loin de moi l’envie de dissuader quelqu’un de le lire : pour moi, c’est un des meilleurs auteurs de romans noirs britanniques actuels.

  3. Je ne suis pas du tout fan de polar et pourtant j’irai bien faire un tour à Aberdeen avec l’inspecteur Mc Rae. Après tout j’ai bien lu Pike le mois dernier^^

  4. tout à fait d’accord avec Manu sur ce manque de respect pour les lecteurs et a fortiori de l’auteur.
    J’ai dévoré ses 2 premiers livres (les seuls traduits en français pour l’instant). j’y ai retrouvé un peu du Ian RANKIN que j’aime beacoup aussi.
    Effectivement ce n’est pas très sport de critiquer ses confrères.
    Bref j’attends toujours la traduction des suivants et il commence à y en avoir beaucoup.

    1. Je pense aussi que c’est vraiment une bonne série. Mais pour l’éditeur, l’important n’est pas la qualité mais la quantité de livres vendus…

  5. Je ne connais pas du tout mais je suis moi aussi plongée dans un polar écossais avec Peter May, que je ne connais pas du tout mais découvre grâce à mon amie Cryssilda, toujours partie dans les Highlands 🙂

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