Terminus Belz d’Emmanuel Grand

Terminus BelzQuatre amis ukrainiens parviennent à quitter la misère de leur pays grâce à deux passeurs roumains grassement payés. Mais ceux-ci entendent aussi se faire payer en nature et violent la jeune femme. Les trois hommes se défendent, tuent un des passeurs et s’enfuient. Ils décident de séparer pour mieux échapper à ceux qui ne manqueront pas de les traquer. Pour Marko, ce sera terminus Belz, une île bretonne (fictive) au large de Lorient.

Les marins-pêcheurs de Belz ne voient pas d’un bon œil l’embauche de Marko par Caradec : cet étranger leur prend leur travail. Mais Caradec n’en démord pas, ce sera Marko, qui se fait passer pour grec et donc ressortissant européen. Il sent que le jeune homme est dans une situation difficile et décide de l’aider, lui qui ressemble à son fils perdu en mer. Marko reçoit l’aide de Marianne, du libraire local, mais d’autres, bien plus nombreux, lui témoignent de l’hostilité. Jugand menace même de le dénoncer à la police. Mais Jugand est retrouvé assassiné sur la plage. La police investit l’île et enquête. Marko se sent d’autant plus traqué que Dragos, un homme de main roumain hyper violent est sur les traces des quatre clandestins ukrainiens qui ont tué un de ses hommes. Et il ne fait pas de quartier.

On sait qu’une île est un excellent lieu pour un huis-clos : peu de gens, espace restreint, fuite quasi impossible. L’étau se resserre donc autour de Marko et le lecteur ne peut que compatir à son angoisse puisqu’il qu’il suit aussi le périple fou et sanglant de Dragos qui assassine quiconque se met sur son chemin. La tension monte efficacement, liée à un malaise grandissant : les habitants de Belz murmurent, on dit que l’Ankou serait derrière la mort de Jugand. Car Emmanuel Grand utilise toutes les possibilités offertes par son cadre breton, à savoir les croyances ancestrales. Terminus Belz se double dès lors d’un soupçon fantastique qui ne se réalise pas mais souligne l’importance d’un folklore qui se mue en conviction chez certains.

Et qui dit marins-pêcheurs bretons dit métier en crise, et l’auteur ne se prive pas de détailler le rude labeur de ces hommes de mer. Durs à la tâche, frustres, souvent taciturnes mais aussi solidaires. D’une misère à l’autre, de l’Est à l’Ouest, Emmanuel Grand promène son intrigue bien construite et son suspens efficace jusqu’au bout. Il dessine des personnages tourmentés par le remords, la fatigue, la peur, la solitude (Marianne, personnage féminin du roman, est le seul qui ne m’a pas convaincue). Tout simplement le poids parfois trop lourd de la vie.

Terminus Belz

Emmanuel Grand
Liana Levi, 2014
978-2-86746-706-6 – 365 pages – 19 €

13 commentaires sur “Terminus Belz d’Emmanuel Grand

    1. Les atouts sont en effet nombreux. J’ai juste trouvé que la relation entre Marko et Marianne était beaucoup trop rapide pour être crédible et trop stéréotypée…

  1. j ai déjà noté ce roman, c’est vraiment le drame de notre époque ces gens qui fuient leur pays et qui rencontrent la lie de la terre : les passeurs violents et rapaces.
    que de romans sur ce thème , j’espère que ni moi ne les miens ne connaîtront ce drame!
    Luocine

    1. Je craignais un peu cet aspect en ouvrant le roman, je craignais le cliché et la surabondance d’images sordides. Mais non, l’auteur traite de façon juste et sobre cette situation si terrible et que je ne souhaite à personne.

    1. J’imagine que quand on connait les lieux qui ont inspiré un roman, ça lui donne une dimension supplémentaire. Bon ici, on ne peut pas dire que « Belz » donne un visage très tentant de la Bretagne…

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