La maison biscornue d’Agatha Christie

la maison biscornueParfois vient le moment où l’on se dit qu’un petit Agatha Christie pourrait faire du bien. Entendons « petit » au sens affectif car dame Agatha est grande, bien sûr. Et là, le dilemme : lire ou relire ? Décortiquer une fois de plus Le meurtre de Roger Ackroyd ou Les dix petits nègres pour le plaisir de comprendre comment fonctionne la machinerie narrative ? Choisir un titre presque au hasard, tout en sachant qu’on a probablement déjà lu les meilleurs ? En privilégiant la nouveauté, je n’ai pas été déçue par La maison biscornue.

Tout est très traditionnel. Charles, le narrateur, est tombé amoureux de Sophia Leonidès. Quand il rentre de mission pour le Foreign Office après la guerre, il lui renouvelle sa flamme et la jeune femme lui présente sa famille. Le riche grand-père d’origine grecque règne sur trois générations de Leonidès dans sa maison biscornue d’un lointain faubourg de Londres. Sa belle-sœur Edith, sœur célibataire de sa défunte épouse ; ses deux fils, Roger et Philip et leurs femmes respectives, et les trois enfants de Philip : Sophia, Eustace et Josephine ; et surtout la seconde et très jeune épouse du grand-père : Brenda a cinquante ans de moins qu’Aristide et d’aucuns la soupçonnent de fricoter avec le jeune précepteur des petits-enfants. Sophia pourtant affirme que tout le monde cohabite au mieux, car l’aïeul, loin d’être un tyran, utilise sa fortune pour venir en aide aux siens. Pourtant, pourtant, voilà qu’on le retrouve mort, empoisonné…

Et parce que son père travaille à Scotland Yard, Charles va prendre une place importante aux côtés de l’inspecteur principal Taverner chargé de l’enquête. En tant que nouveau fiancé, il est introduit dans la famille et porte sur chacun de ses membres un regard neuf. De surcroit, il est assisté d’une apprentie détective aussi étrange que perspicace : Josephine, la soeur de Sophia, est une enfant douée et intuitive qui passe son temps à écouter aux portes et en sait donc beaucoup sur les querelles familiales qui doivent rester inavouées. Charles doit-il s’en faire une alliée ?

Charles enquête, interroge, découvre de petits secrets et de bons motifs d’assassinat chez à peu près chaque membre de la famille. Mais il ne va pas assez vite car un deuxième crime a lieu : la bonne est morte empoisonnée en buvant le chocolat destiné à la petite Josephine…

On sait qu’Agatha Christie a voulu prendre à rebrousse-poil dans certains de ses romans les lois du genre policier pour mieux les enfreindre. Il faut que le lecteur soit surpris par l’assassin, qu’il ne soupçonne pas une minute son identité pour des raisons pratiques, morales, physiques, littéraires… que sais-je encore. Il en va de même pour La maison biscornue qui se termine sur l’inattendu. Roman mineur s’il en est, il est tout de même très bien troussé. Et la fin est… surprenante !

Agatha Christie sur Tête de lecture
 
La maison biscornue

Agatha Christie traduite de l’anglais par Michel Le Houbie
LGF (Le Livre de poche), mars 2010
ISBN : 978-2-253-03337-0 – 188 pages – 5,20 €

Crooked House, parution en Grande -Bretagne : 1949

38 commentaires sur “La maison biscornue d’Agatha Christie

    1. J’oublie toujours les fins de romans policiers. D’un côté, c’est inquiétant pour l’état de mes neurones, mais d’un autre, ça me permet de relire ceux que j’ai lus avec plaisir avec les mêmes dispositions.
      Mais curieusement, ça ne fonctionne pas avec les romans d’Agatha Christie, en tout cas pas ceux qui travaillent justement la matière policière et bluffent le lecteur quant à l’identité du meurtrier. Il y a donc bien des chances que celui-là me reste aussi.

  1. Je ne connais pas ce roman mais à vous lire j’en déduis qu’un roman mineur d’un bon écrivain, place néanmoins la barre assez haut pour qu’on s’en régale. Est-ce dans leurs « petits » bouquins qu’on repère les grands écrivains ?

    1. Ce titre-là est « mineur » pour Agatha Christie, mais pour ma part, je le préfère à d’autres avec Hercule Poirot qui me semblent moins élaborés. Je ne sais pas pourquoi ce titre est moins connu… je ne peux malheureusement pas ici en commentaire échafauder des explications liées à la fin du roman, mais peut-être est-ce là qu’on peut les trouver…

    1. Tu as raison : mineur n’est pas le bon mot, disons qu’il est méconnu. Pour ma part, je n’en avais pas entendu parler, c’est au détour d’un commentaire Facebook que je l’ai découvert.
      Et bien sûr, la fin est terriblement surprenant, osée oui, c’est peut-être pourquoi ce roman n’est pas assez mis en avant…

  2. Un bon souvenir… Mais je ne me souviens plus de l’histoire…. Ca fait tellement longtemps 🙂

  3. je n’ai pas relu Agatha Christie depuis très longtemps, elle fait partie des auteures qui m’ont fait me détacher des romans policiers. Tout le monde aimait autour de moi, j’ai fini par dire « moi aussi » sans être du tout convaincue , je la supporte quand elle n’utilise pas Hercule Poirot qui m’énerve au plus haut point. Il faudrait que j’en relise un .. pou voir si je retrouve mon agacement face à ses personnages tellement convenus que je ne comprends toujours pas comment on peut accepter de croire que de tels personnages puissent exister.

    1. Ce roman-ci est lui aussi très traditionnel dans la société qu’il décrit : les personnages, leurs rapports, leur mode de vie. Il y a des archétypes chez Agatha Christie et si on ne les apprécie pas, j’imagine qu’il n’est pas tentant de les retrouver d’un livre à l’autre. Cependant, sans en dire trop, la fin va à l’encontre de… comment dirais-je… les bonnes manières prônées par la bonne société bourgeoise qui peuple les romans d’Agatha Christie.
      Et moi non plus je ne supporte pas Poirot, moins encore depuis que j’ai vu certaines adaptations, je crois.

  4. À lire bientôt et j’avoue préféré les titres  »indépendants » de série de dame Christie. Peut-être est-ce du au fait d’avoir lu trop d’enquêtes de Hercule Poirot et de Miss Marple qui sont devenues de plus en plus semblables :a à longue.

    1. Je viens d’aller vérifier : Hercule Poirot est présent dans Le crime de l’Orient Express et Le meurtre de Roger Ackroyd, à mes yeux parmi les meilleurs avec Dix petits nègres. Eh bien j’avais complètement zappé Poirot dans ces deux titres tellement ce qui compte le plus à mes yeux, c’est la maîtrise narrative…

  5. Je suis sure de l’avoir déjà lu mais je ne m’en souviens plus. Je suis sure aussi que je le relirai. Comme toi, parfois le besoin d’une lecture qu’on sait simple mais efficace se fait sentir. Et dans ces cas là, je me tourne facilement vers dame Agatha. Qui me déçoit rarement.

    1. J’aimerais prendre plus de temps de relire, mais il y a tellement de livres tentants qui sortent que je privilégie bien trop la nouveauté…

  6. Alors, alors, avec le mois anglais qui se profile, un « petit » Agatha Christie, comme tu dis, ça tombe à point nommé! je ne connais pas ce titre, mais cette fin surprenante m’intrigue!

  7. Je suis TOUJOURS surprise ! Parfois je vois venir Conan Doyle mais elle, jamais. Pour le mois anglais, j’en ai quelques uns que je vais sortir.

    1. Moi aussi, toujours, avec elle ou avec n’importe qui : je ne cherche pas, je me laisser porter et surprendre. Si bien que si je comprends avant la fin, c’est soit que le romancier le veut, soit que c’est un très mauvais livre…

    1. Parfois, les adaptations sont tellement british qu’elles peuvent agacer. Mais si tu me dis que celle-ci est bien, je te fais confiance.

  8. Moins connu que les titres que tu cites en début d’articles, je l’avais trouvé très très bon, surprenant comme tu l’écris. Un des titres que je conseille assez facilement pour permettre aux copains de sortir des titres les plus connus.

    1. Figure-toi que je suis en train de relire un Ruth Rendell. Son décès la rappelle à l’actualité et mes excellents souvenirs de lecture me reviennent en mémoire : j’ai choisi un titre qui m’a beaucoup plu il y a près de 25 ans, et je me régale à nouveau !

    1. Surtout que quand on croit qu’il n’y a plus d’Agatha Christie, il y en a encore ! Cette femme a vraiment beaucoup écrit…

  9. enfin lu! et bien apprécié! la fin est en effet surprenante (moins que prévu, puisque j’étais bien prévenue …) Elle me rappelle d’ailleurs un autre roman mais je ne sais pas plus lequel. Mémoire, ô mémoire…

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