Très loin de ce que pourrait laisser penser la couverture, on suit dans ce roman les traces d’un jeune garçon d’une douzaine d’années dans les États-unis du XIXe siècle. Il s’agit de Ren, orphelin et manchot, qui au départ se morfond dans l’orphelinat catholique où il a grandi : vu son âge avancé et son handicap, il y a peu de chances pour qu’il se fasse un jour adopter. Pour lui, ce sera l’armée, c’est-à-dire une mort précoce.
Arrive un jour un homme, Benjamin Nab, qui regarde les garçons, tombe à genoux devant Ren et à la vue de son bras s’exclame : tu es mon frère ! Il raconte à l’enfant et au père John qu’ils vivaient jadis dans la forêt sauvage avec leurs parents et que lors d’une attaque d’Indiens, Ren a perdu son bras. Son frère l’a sauvé mais a dû l’abandonner pour partir à la recherche des meurtriers de leurs parents et les venger. Ren, heureux de s’être enfin trouvé une famille, part avec lui.
Mais Benjamin n’est en fait qu’un voleur bonimenteur, ravi d’exploiter un gosse estropié pour mendier et attendrir les gens. Au sortir de l’orphelinat, ils couchent chez un couple qui leur ouvre leur grange, et Ben se sauve avec Ren, emportant cheval et carriole. Ils arrivent en ville, vivent dans une ruine avec Tom, ancien instituteur, alcoolique, voleur aussi. Ils font l’aumône, déterrent des corps pour les revendre à l’hôpital. Ren, déjà doué pour la rapine, se perfectionne et devient vite indispensable. Mais voilà qu’une nuit, un des cadavres déterrés se relève…
Impossible et surtout dommage de raconter les multiples rebondissements de ce roman qui se lit comme un feuilleton. La jeune auteur fait preuve d’une grande imagination, même si elle s’inspire de grands auteurs du XIXe siècle comme Mark Twain et Charles Dickens. L’orphelin, le voleur, la logeuse, le père disparu, la mine, les usines, beaucoup de personnages et de cadres familiers ici réinventés par une langue dynamique et une grande habileté dans le portrait et le rebondissement. Les marges de la société et de l’humanité se côtoient, non sans humour. On peut y voir aussi une touche de western et un brin d’émotion au final, tout à fait bienvenue.
Le personnage de Ren fait écho à celui de nombreux orphelins littéraires, et s’il est très réussi, j’ai encore préféré celui de Benjamin Nab, véritable escroc, menteur, voleur, baratineur à souhait, parfois perdant mais pas pour longtemps. Son verbe à lui tout seul est un plaisir.
Sont-ils nombreux les auteurs américains à ne pas donner dans l’introspection, la critique sociale, les conflits raciaux, le post 11 septembre ? Je ne sais mais vu d’ici, en France, peu de romans renouent vraiment avec la grande tradition romanesque du roman d’apprentissage. Du côté de la jeune génération, les préoccupations semblent être autres. Réjouissons-nous donc de cette heureuse traduction et suivons les pas de ce jeune voleur vers la liberté et l’identité.
Le bon larron
Hannah Tinti traduite de l’anglais par Mona de Pracontal
Gallimard, 2009
ISBN : 978-2070705405 – 374 pages -24 €
The Good Thief, parution aux États-Unis : 2008
Comme la bibli de R. éjecte les couvertures et ne laisse que celle sobre de Gallimard (je leur en parlais, c’est un choix…), j’ai lu ce roman sans voir le type dessus.
Bref, j’ai avalé dans les deux cents pages, tu as raison, plaisir du feuilleton à la Dickens ou Twain, puis cela m’a lassée, j’ai abandonné (je sais, c’est mal). J’ai peut être du mal avec les orphelins littéraires, comme tu dis, Oliver Twist n’est pas le personnage qui m’a le plus emballée, par ailleurs, alors tu vois…
Tu n’as pas voulu savoir qui sont Ren et benjamin ? Comment ils allaient finir ? Et l’ambiance de cette ville minière abandonnée des hommes ne t’a pas séduite ? J’aurais juré du contraire… Je ne suis pas fan de Dickens, mais justement, c’est Dickens sans les fioritures et les longueurs !
Je suis humaine et faible, j’ai dû regarder les dernières pages quand même…
je note pour ma demoiselle 🙂
Mais comment fais-tu pour repérer tous ces livres qui me sont comlètement inconnus !!! Celui-ci je le note en GROS car je suis une fanatique des romans feuilletons et je sais que je vais aimer celui-ci même si ce genre populaire pèche par de nombreux aspects (outrances, invraisemblances…. mais c’est ce que j’aime !). Je suis impatiente de le lire !!!!
celui-là, c’est sur la blogo que je l’ai découvert à sa sortie. Il attendait son tour, sagement noté sur ma LAL depuis…
J’adore ce genre de romans et si tu dis que c’est comme Dickens mais sans les fioritures habituelles de l’époque, je note encore plus.
Oh la la, les puristes vont nous maudire ! 🙂
Je ne sais pas, j’hésite et pas à cause de la jaquette, en général et quand c’est possible, je les enlève…
Mais je me le note quand même dans un coin.
je n’ai pas bien compris la signification de cette couverture que je trouve bien trop moderne pour ce livre…
Je t’adore, Ys, quand tu me fais retrouver des titres perdus au fin fond de ma liste à lire ! Et, ma foi, je crois que ma bibli l’a en rayon !
Il faut dire que ce livre est revenu à la surface grâce à l’été. J’étais avec ma liste à la bib, en train de me dire que certaines perles y étaient inscrites depuis vraiment longtemps, des romans vraiment romanesques comme j’aime en lire parfois, alors je me suis mise en quête de ce livre et je l’ai dévoré avec grand plaisir sous le soleil languedocien 😉
Je trouve la couverture peu réussie … si je n’avais pas vu ce livre sur les blogs, je serais sûrement passée à côté, en pensant que c’était une histoire qui se passait à notre époque (voire peut-être même dans un futur proche !)
Je suis tout à fait d’accord. Il me semble avoir entendu à l’époque de la sortie un journaliste qui disait que la couverture était tout à fait dans l’ambiance gothique du roman… un mystère…
Chouette un feuilleton !
Hélas je ne lisais pas Dickens mais les pieds nickelés, ce doit être une lecture qui ne risque pas de donner mal à la tête.
Il n’est pas interdit de lire Dickens ET les Pieds Nickelés 😉
Tant pis pour les puristes ! On est là pour se faire plaisir, non ?
J’hésite. Je crois que je vais commencer par les originaux que je n’ai pas encore lus. Quoique romans américains, que tu as aimé, …
J’ai essayé de partir en vacances avec le meilleur de ce qui attendait depuis longtemps dans ma LAL et c’était plutôt réussi…
Enfin un bon roman américain qui n’ait pas d’attaches avec le 11 septembre…
A noter donc si on est un peu las du thème…