Un petit boulot de Pascal Chaumeil

Affiche Un petit boulotUn petit boulot est une adaptation du roman éponyme de Iain Levison. Fidèle au titre mais aussi à l’intrigue, jusque dans les patronymes qui ne sont que francisés. Adieu le Wisconsin, c’est dans le nord de la France que vit Jacques (Romain Duris), région sinistrée par les fermetures d’usines. Lui et ses potes ont été licenciés et galèrent pour survivre. Après son travail, Jacques a perdu sa copine, sa télé, seul son banquier lui téléphone encore avec une pénible constance.

Il essaie Jacques, il essaie de s’en sortir parce que c’est un travailleur honnête et consciencieux, il va le prouver tout au long du film : ce qu’il promet, il le fait. Ce qu’il voit, c’est que son pote Tom (Gustave Kervern) qui bosse dans une station-service ne s’en sort pas alors que Jeff (Charlie Dupont), qui trafique à droite à gauche tient la tête hors de l’eau. Aussi quand André Gardot (Michel Blanc) le bookmaker et truand local lui propose un job peinard quoiqu’un peu illégal, il accepte : il va tuer madame Gardot, la femme infidèle de son nouveau patron.

Tout se passe bien, c’est vraiment un petit boulot tranquille. Le deuxième meurtre, Jacques le commet pour lui, en colère contre les patrons et cette économie dirigée par des types en cravate. Le type, c’est Brecht (Alex Lutz) et on finit par penser que ce fouille merde n’a pas volé son sort !

Ma lecture du roman de Levison date de quelques années, mais je me souviens du plaisir pris au mélange d’humour noir et de critique sociale. On retrouve la même chose ici, certaines réparties sont épatantes (l’adaptation des dialogues par Michel Blanc est une réussite) et la misère sociale évidente. Michel Blanc manie à merveille le cynisme et Romain Duris est convaincant en type à bout. Même si parfois, il a quelque chose de Gérard Lanvin dans les films de méchants d’autrefois… On trouvera que la police manque de conviction dans son enquête, et que l’accumulation de cadavres s’avère excessive. Mais le scénario ne table pas sur ce réalisme-là. Car à l’évidence, on se prend d’affection pour ce tueur, victime du système.

On se retrouve donc dans un film bien de chez nous où la débrouille, même totalement immorale, est l’apanage des laissés-pour-compte. Jacques prend sa revanche sur la société et devient ainsi héroïque : il l’emporte sur le système qui a voulu sa peau. A aucun moment le spectateur ne plaint les victimes de ce tueur sympathique : ce qui compte ce n’est pas l’acte lui-même et ses conséquences, mais la revanche sociale qu’il permet.

Pas une fausse note dans ce film, voire même quelques épatants seconds rôles comme Alex Lutz en peau de vache qui termine avec une bouteille de bière dans le c** et le jeune employé de la station-service (Thomas Mustin), incompréhensible juste quand il faut. Parfois quelques longueurs, vite oubliées grâce à des scènes de pure farce, mode noir bien sûr, qui vont crescendo jusqu’au grand n’importe quoi gaguesque mais réjouissant des Baléares.

Servie sur un plateau par un roman épatant, cette adaptation à la française est une comédie noire qui remplit son contrat : on aime toujours autant les gentils truands.

Un petit boulot de Pascal Chaumeil
Sortie nationale : 31 août 2016 – Durée : 1 h 37

17 commentaires sur “Un petit boulot de Pascal Chaumeil

  1. J’ai écouté deux interviews de Michel Blanc hier à la radio, les deux intéressantes. Il soulignait que le roman de Ian Levinson était beaucoup plus féroce que son adaptation. En tout cas, j’ai envie de le voir ce film.

    1. Je pense que tu ne seras pas déçue. Ça n’est pas le film de l’année, mais on passe un bon moment même si ça manque de diners 😉

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