Après trente ans, Emilia retrouve enfin son mari, Simón. Trente ans de recherches, d’espoir, d’amour. Car malgré tous les témoignages, Emilia a toujours su que son mari était vivant. Qu’il n’ait pas vieilli, qu’il soit habillé et coiffé comme à la fin des années 70 importe peu, le principal est qu’il soit revenu.
En 1977, Emilia et Simón, deux jeunes géographes, voyagent dans le nord de l’Argentine. Ils sont arrêtés au cours de relevés topographiques par une patrouille militaire qui les interroge sans ménagement. Ils sont emprisonnés. Quand Emilia est libérée, on lui dit que son mari est déjà sorti ; elle ne le reverra jamais. C’est que la jeune femme est la fille d’un membre très bien placé du gouvernement de la junte, le docteur Dupuy, qui semblerait ne pas avoir bien vérifié les antécédents de son gendre avant le mariage. Quelques propos subversifs, et le jeune homme disparait, laissant une Emilia certaine qu’il reviendra.
C’est qu’Emilia a toujours vécu dans la crainte et l’admiration de son père. Elle ne croit pas aux crimes des militaires, elle ne croit pas aux disparitions, papa a dit que c’étaient calomnies… Mais elle aime Simón, aussi suit-elle sa trace, de messages en cartes postales qui l’appellent et entretiennent l’espoir de Rio à Caracas en passant par Mexico.
Qui est cet homme qu’Emilia a rencontré : est-ce bien Simón comme Emilia en est convaincue ou un usurpateur ? Tomás Eloy Martínez nous emmène sur les pas des deux jeunes mariés ; nous fait suivre le bonheur retrouvé d’Emilia et parsème son roman de récits de disparitions, pas forcément physiques, car il y a beaucoup de façon de disparaitre au monde, perdre la raison en est une. Et parce que rien n’arrête l’imagination des militaires, pourquoi ne pas invoquer l’enlèvement pas les extraterrestres ?
Tomás Eloy Martínez met en scène le désespoir et l’amour qui ont entretenu Emilia, et donc probablement beaucoup de femmes pendant les années où elles ont attendu le retour d’un disparu. Peu à peu, Emilia entre dans sa fantasmagorie, dans le monde qu’elle s’est créé pour que son amour perdure, glissant ainsi vers la folie douce. Il est aussi question des dirigeants à travers le père d’Emilia, son autoritarisme, son opportunisme, sa bêtise. Il manipule les gens, même ceux qui lui sont le plus proche, se forge une image à force de déclarations et de discours, édicte des principes qu’il ne s’applique pas.
Purgatoire est un beau livre sur l’illusion (romanesque), le mensonge nécessaire pour continuer à vivre la vérité indispensable pour savoir qui on est.
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Purgatoire
Tomás Eloy Martínez traduit de l’espagnol par Eduardo Jiménez
Gallimard, 2011
ISBN : 978-2-07-01612-5 – 300 pages – 21.90 €
Purgatorio, parution en Argentine : 2008
Bonjour, je ne sais pas lequel choisir dans cette catégorie du challenge d’Ys. Alors, pour quoi pas celui-ci qui a un thème qui m’intéresse. Merci
C’est une découverte pour moi cet auteur, que je suis ravie d’avoir faite.
Il me tente bien !
si je tombe dessus je le lirai, mais il y a un je ne sais quoi qui m’arrête dans ta description. je ne ne suis pas certaine d’aimer le mélange réalité et imaginaire
Luocine
c’est que je l’ai mal présenté 😦
Cela me fait penser au film « Le retour de Martin Guerre ».
Pas de souvenirs de ce film…
je ne pense pas avoir jamais lu un auteur espagnol, il est peu être temps que je remédie à cette lacune, et pourquoi pas avec ce roman…
je viens de voir que l’auteur est argentin, j’ai jamais lu non plus d’auteur de cette origine… donc toujours pourquoi pas!!!
Tu vas pouvoir trouver des idées ici, les hispanophones, quel que soit le pays, je les aime. Et je me dis qu’ainsi, l’index géographique auquel je tiens beaucoup est un peu utile…
Que dire sinon : « encore un à noter sur ma liste » 😉 ?
Tu fais bien !
non, ne dit pas que ton commentaire ne reflète pas bien les qualités du livre, bien au contraire c’est moi qui parfois suis difficile à convaincre , surtout en ce qui concerne l’imaginaire et je suis souvent déçue par la littérature d’Amérique latine
mais ton texte donne envie , c’est moi qui freine
amicalement
Luocine
Intéressant, je note!
Les thèmes de la disparition et de l’Histoire me plaisent bien. À lire sûrement.
Il me tente bien également !
Que voilà une bien étrange histoire… un bien beau livre… et toujours, sur ton blog, des auteurs que je ne connais pas. Une belle découverte en perspective avec Tomas Eloy Martinez!
dit comme ça, ça fait envie…
Pas mal ce sujet. Il a l’air d’être traité de manière originale. Je vais essayer de retenir.
Oui, et ce n’est pas facile car le thème des disparus est vraiment très souvent traité, par les Argentins et les autres (cf. Mapuche de Caryl Ferey).