«Connecticut. États-Unis. Le 14 décembre 2012, Adam Lanza, un jeune homme de vingt ans tire quatre balles dans la tête de sa mère. Puis il prend la voiture garée devant leur grande maison de Newton avant d’aller tuer vingt enfants et six adultes dans l’école élémentaire de Sandy Hook. Il est armé d’un fusil semi-automatique Bushmaster qui appartient à sa maman. Il est ainsi certain de faire un maximum de victimes en un minimum de temps. Le chargeur de trente balles, rapide à enclencher, peut en tirer deux à la seconde. La dernière est pour lui. »
Ainsi débute et se clôt Les érections américaines, dernier roman d’Amanda Sthers, par ailleurs auteur d’une biographie de Johnny Hallyday et adaptatrice en français d’une comédie musicale parodiant Cinquante nuances de Grey. Autant dire qu’Amanda Sthers s’y connait en superficialité.
Les érections américaines pourraient s’apparenter au genre du roman-enquête, ces fictions à peine romancées qui s’appuient sur des faits réels, des faits divers qui, selon l’expression consacrée, ont défrayé la chronique. Souvent un événement dont la violence surprend et dépasse la compréhension de l’individu rationnel de base. Quelque chose qui a à voir avec une fascination pour le Mal.
Amanda Sthers s’est en effet rendue sur place, à Newtown (et non Newton comme écrit dans le roman…).
Mais Amanda Sthers ne rend pas compte de son enquête aux Etats-Unis, préférant entretenir le lecteur de ses soirées new yorkaises arrosées, non cocaïnées (non merci, pas ce soir) mais qui lui permettent néanmoins de conclure, comme on disait jadis. Et ces quelques jours à New York serviront à évaluer tout le reste du pays. Après avoir écouté l’auteur parler de son roman chez Augustin Trapenard, je m’attendais à autre chose : des faits, une enquête, de ces reconstitutions journalistiques auxquelles les romanciers se livrent parfois et qui font avancer la réflexion, ou au moins interrogent la société.
D’ailleurs, il n’y a pas enquête au sens propre dans Les érections américaines puisque qu’Amanda Sthers ne cherche qu’à prouver sa théorie : tuer en masse ses semblables à l’aide d’une arme à feu est « la manifestation d’une frustration sexuelle » (le papa d’Amanda est psychanalyste). Car l’arme à feu est un symbole phallique. Et aux Etats-Unis, chacun peut posséder une arme à feu. Les Etats-Unis sont donc un pays de frustrés qui dégomment quand ils pètent un câble. CQFD. Adam Lanza serait le symptôme d’un pays débordé par ses codes, ses lois, une nation partagée entre le puritanisme et la pornographie. A chacun de trouver sa place. Ceux qui n’y parviennent pas ont un profil type, celui d’Adam Lanza : mère dominatrice, tête de turc à l’école, absence de vie sociale, jeux vidéo à outrance… Un faisceau de prédispositions donc, et non une unique raison qui expliquerait tout : la frustration sexuelle.
Amanda Sthers semble découvrir des choses à la faveur de son voyage : que les Etats-Unis, ça n’est pas ce qu’on nous en montre, grosses bagnoles et dents bien blanches. Qu’il y a là-bas une sacrée dose de faux semblants et de frustrations qui sont à l’origine d’une peur atavique de l’autre (le pays s’est construit sur le meurtre), d’un violent sentiment d’insécurité (d’où les armes à feu) et d’un individualisme sans borne. Amanda Sthers ne lit pas la littérature américaine contemporaine.
Mais elle fait œuvre de fiction puisque que Les érections américaines est sous-titré « roman ». La partie fictionnelle tient en d’indigents chapitres intercalés entre ceux de « l’enquête » et censés restituer la psyché malade d’Adam Lanza. Les poncifs s’enchaînent : papa parti, maman m’aime trop, les autres se moquent de moi. A aucun moment on ne comprend comment de cet être-là est sorti Adam Lanza.
Ce qu’a tenté Amanda Sthers dans Les érections américaines, avec peu de conviction semble-t-il, est un échec : on ne peut pas comprendre un individu en allant passer quelques jours dans le pays où il est né. On ne peut pas accumuler les images (les mères abandonnées, les flingues, le sexe à outrance ou le puritanisme), écrire quelques lignes impressionnistes sur la possible enfance d’un pauvre type et sortir de son chapeau le profil type du tueur de masse. Même avec l’aide du docteur Freud. Rien n’est convaincant dans ce livre qui pèche par superficialité.
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Les érections américaines
Amanda Sthers
Flammarion, 2013
ISBN : 978-2-0813-0345-4 – 126 pages – 12 €
Une auteure que je ne m’attendais pas trouver chez toi … j’avoue que rien de ce qu’elle fait ne me tente.
Ah bon ? Mais moi je ne la connaissais pas du tout, je savais juste pour Johnny mais par pour 50 nuances…. En fait, je m’attendais à un livre sur le phénomène serial killer aux USA avec Lanza pour exemple principal, mais ce livre est plus que vide.
Rien que le titre m’aurait fait fuir … Merci d’avoir lu pour nous 😀
Le titre aurait été adapté au contenu s’il y en avait eu un…
J’avoue qu’elle m’a fait beaucoup de peine l’autre soir chez Ruquier face à un Aymeric Caron au pire de sa forme… j’avais presque envie de le lire quand même (mais bon, même si c’est court… pas le temps !)
Ruquier n’est pas ma tasse de thé mais je sais que ses intervenants ont leur franc parler. Et c’est tant mieux. Je pense que les invités de cette émission savent à quoi s’attendre. Et puis c’est quand bon de savoir que la Busnelisation n’a pas atteint toutes les émissions 🙂
Ma foi, les mauvais bouquins donnent aussi de bons billets…
Merci, c’est gentil. Je ne sais pas si tu as écouté « Le Carnet d’or » avec cette auteur, mais je ne m’attendais pas du tout à ça. Je pense que les livres des deux autres auteurs invités me plairaient finalement plus…
Le titre est ridicule, le contenu n’a pas l’air meilleur… autant passer son chemin sans se retourner.
Je trouve le titre pas mal, il correspond bien au contenu du livre tel que je l’avais imaginé mais qui manque de chance ne figure pas dans le livre…
Il a l’air bien superficiel, en effet. Une oeuvre de commande ?
Dans le roman, elle essaie de faire croire qu’elle s’est sentie concernée par le sujet, en tant que mère (elle écrit « maman » pour faire plus émouvant), mais c’est totalement raté.
Bon, ce bouquin ne me disait déjà rien… Là, c’est sûr, je n’ai plus aucune envie de le lire ! 😉
Je pense sincèrement que tu ne manques rien.
Bravo ! J’aime les blogs qui n’hésitent pas à dire quand un livre est mauvais mais en argumentant évidemment. Comme ici. Continuez, il faut que certains se dévouent pour nettoyer les écuries d’Augias de la littérature…
J’espère plutôt qu’il n’y en aura pas trop : quand je choisis mes livres, je pense qu’ils me plairont, je joue la facilité en allant vers ce qui me plait a priori. Alors je suis d’autant plus déçue quand le livre ne correspond pas du tout à mes attentes, comme celui-là. Du coup, ça m’agace, et voilà…
J’aime beaucoup ton billet mais cette auteur ne me tente pas du tout.
Un truc chez elle qui me gêne, sans bien savoir lequel…
La vacuité du propos peut-être… sa prétention ?
Le côté hyper médiatisé parce que ex Mme Bruel me dérange et me la rend superficielle en tant qu’auteur, c’est débile mais c’est comme ça !!! Et ton billet confirme mes préjugés (aussi débiles soient-ils !!!)
Euh… ben tu m’apprends quelque chose… je suis vraiment ignorante de ce genre de choses. Est-ce qu’il vaut mieux ? Je n’aurais pas ouvert ce livre peut-être et ça n’aurait pas été une grande perte…
Je n’ai lu qu’un seul roman d’elle totalement insipide et bourré de clichés à un point assez peu rencontré depuis. Je l’avais lu parce que A. Sthers était dans le même jury que moi pour un prix littéraire, sauf que madame n’est venue à aucune rencontre ni même à la remise de prix sans excuses ni rien. Je n’ai pas renouvelé l’exercice de la lire ; j’aime beaucoup ton début sur elle et la superficialité (le reste est très bien aussi)
Eh bien moi, sauf sous la torture ou pour sauver ma vie, je ne vois pas pourquoi je la lirais à nouveau… si en plus elle n’est pas capable d’assumer ses engagements, il n’y a plus grand-chose pour la sauver…
Boudju, tu ne donnes pas envie de le lire. Merci de m’éviter un achat 😉
Je ne la connaissais avant de lire ton billet et je dois dire que je n’ai pas envie de poursuivre ma découverte après lecture de tous les commentaires.
Ça fait plaisir de voir que nous sommes deux ou trois extraterrestres à ignorer la vie sentimentales d’Amanda Sthers qui a pourtant l’air de tout faire pour qu’elle se sache…
Marie (du blog Et Puis) m’a dit que tu avais écrit un billet sur le livre du siècle que j’ai eu la bonne idée de lire moi aussi; si ça te dis http://leslivresdecamille.wordpress.com/2013/11/21/les-erections-americaines/ nos avis se rejoignent tellement 😉
En espérant que nous avons lu là le plus mauvais livre du siècle 😉
Bonjour Sandrine, rien que pour son titre assez racoleur, ce roman ne m’attire pas du tout. Je passe. Bonne après-midi.
A bientôt quand même j’espère 😉
Je ne connaissais pas cet auteure et encore moins ce livre.
Elle était sur le plateau de « Vivement dimanche prochain » pas pour ce livre.
Pour une pièce théâtrale « Le mur » avec Rufus, Calfan, cela semble pas mal comme idée.
L’imagination pour certains, permet mieux de sortir des réalités du monde dans lequel on ne fait que passer.
L’Amérique, que je connais, c’est à Douglas Kennedy, que je donne le plus de points.
Amanda Sthers a une actualité particulièrement fournie en ce moment…
Tout le monde en parle 🙂 mais bizarrement je ne suis pas tentée 🙂
Si j’en avais plus entendu parler, je ne l’aurais pas lu…
Non merci pour moi! J’avais aimé un roman de l’auteur pourtant… bon, je l’ai un peu oublié mais j’en avais de bons souvenirs. Ceci dit, ce genre de généralisation superficielle… je passe avec joie!
Tu ne rates rien.