« Tind ? C’est une nouvelle revue culturelle. Une revue qui a décidé d’allier humour, harmonie et intelligence pour parler de culture et de littérature. Une revue qui s’attache au passé, au présent et à l’avenir. Une revue de lettre(s) et d’image, qui peut parler sérieusement, sans se prendre au sérieux« .
Tind, c’est une belle revue, consistante dans la forme et le fond, dont on a besoin de parler, qu’on a envie de partager. Le pari aujourd’hui d’une revue papier, qui traite de littérature, de BD, de typographie semble risqué. Mais quand une bande de même pas trentenaires se jette dans l’aventure, c’est grisant, culotté et intéressant. Quelques questions donc à l’équipe de Tind : Jean-Baptiste Chouvenc, Pierre-Yann Lallaizon et Eloi Morterol.
Le premier numéro de Tind est paru en mars 2014 : ce premier numéro est-il celui dont vous rêviez à l’aube de votre projet ?
Dire que nous rêvions de ce numéro dès l’origine du projet nous semble un peu osé car il s’est composé au fil des rencontres et de nos envies. Nous avons mis plus d’un an pour le réaliser ! Nous sommes néanmoins véritablement ravis de la forme finale qu’il a pris, de sa tournure, de sa main et des auteurs. Tout a été pensé pour qu’il prenne cette dimension-là. Le second lui a été réalisé en quatre mois, les délais sont donc différents, mais la qualité, elle, non !
Et en matière de retombées, de ventes, comble-t-il vos espérances (quelles sont-elles) ?
(Rires) Un éditeur n’est jamais content des ventes, il en veut toujours plus. Néanmoins pour le premier numéro nous sommes dans les prévisions. Nous comptons surtout sur les abonnés qui sont aujourd’hui une centaine (nous les remercions d’ailleurs !), les ventes se passent bien en librairie également. Mais nous attendons réellement beaucoup de la revue 2 (et de la 3 aussi) qui sont encore plus abouties que la première, et encore plus intéressantes.
Quel est votre public cible ?
Nous n’en avons pas vraiment. Ce sont les curieux de tous genres qui se tournent vers Tind, des lecteurs qui vont aimer la bande dessinée, la littérature, le graphisme, la typo, les feuilletons, les interviews, les hommages, les billets. Bref, tous les lecteurs curieux peuvent se retrouver dans Tind. Du moins c’est ce que nous espérons.
Alors que nombre de revues et magazines (et même d’ouvrages de référence) ne sont plus désormais disponibles qu’en numérique, Tind choisit le support papier à périodicité quadrimestrielle, qui plus est dans un grand format soigné et élégant. Pourquoi ?
Le numérique est une problématique intéressante. Pour mémoire, Tind a d’abord été un site Internet bien que nous avons toujours eu envie de faire un imprimé. Le papier, encore aujourd’hui, peut être synonyme de mémoire et nous voulons que cette revue reste dans la bibliothèque, puisse servir d’objet de référence, puisse être intemporelle. Nos articles ne sont pas liés à une actualité très précise, ils doivent pouvoir se lire dans un an, voire dans dix. Le papier permet cela et nous permet de réaliser un objet de qualité avec une maquette et un graphisme pensés pour lui. Nous avons très envie de faire du numérique mais nous pensons que c’est un média à part entière qui mérite une réflexion et un investissement importants. Pour l’instant nous proposons tout de même la revue en ligne sur le site pour les plus pressés ou ceux qui veulent jeter un rapide coup d’oeil néanmoins.
Vous traitez dans ce premier numéro de littérature, de bandes dessinées, de culture numérique et, chose plus surprenante pour une revue généraliste, de typographie. Vous parvenez même à rendre ce sujet drôle. D’où vient cet intérêt prononcé pour le destin controversé du Comic Sans et l’envie de rendre hommage au Cooper Black ?
Le premier souhait à propos de l’article sur le Comic Sans a été de dédramatiser son utilisation. Oui, c’est une typo haïe, oui, elle possède ses faiblesses, oui elle est sur une confiserie sur deux. Mais ne peut-on pas aller au-delà ? Tout est-il à jeter ? Sûrement pas ! Ouvrir la revue sur ce caractère était une manière d’aborder la typographie d’une manière décomplexée, ludique, et qui se lie aux problématiques visuelles actuelles. Le graphisme est partout, mais comment le comprendre ?
Pour le Cooper Black, et sur les hommages à venir (le Gotham pour le n°2 !), nous avons souhaité faire vivre une police de caractères avec les mots, en parler avec nos sensations, nos affinités, et les animer dans un environnement où on ne les attend pas. Avec le Cooper, on voulait parler de jazz, de gangster new yorkais, de prohibition ! Il n’y avait pas de meilleur moyen d’en parler qu’au travers de cette police ronde et cheesy.
L’éclectisme des sujets abordés vous semble un atout ?
Oui. C’est l’idée même de Tind au commencement. Par exemple la typo, la bande dessinée et la littérature sont pour nous trois domaines essentiels et totalement liés entre eux. Prenons l’exemple d’une bande dessinée, elle prend bien évidemment place dans le domaine littéraire, pour certaines avec des dialogues ciselés, des références évidentes, etc. En terme de typographie, chaque phylactère en comporte, sans parler du titre et de la composition des pages de garde. Cela dégage du sens, indubitablement. De même nous considérons que le graphisme est partout : dans les livres, dans les films, dans la rue, dans le métro, dans les marques. Cet éclectisme que nous avons permet de faire des ponts culturels entre tous ces sujets et d’essayer de percevoir les connexions qui existent.
Eclectisme aussi côté littérature de Barbey d’Aurevilly aux Boloss en passant par John Kennedy Toole, Enig Marcheur, le premier épisode d’un feuilleton de Bruno Pellegrino, etc. Une sorte de grand écart entre le classique et le tendance. Qu’est-ce qui guide vos choix littéraires ?
Quel que soit le biais par lequel nous l’abordons – typographisme, illustration, bande dessinée, littérature, etc. – ce qui nous guide en premier lieu dans notre politique éditoriale, c’est la volonté de mettre en avant des talents, des talents jeunes souvent et des talents un peu moins jeunes parfois, qui jettent un regard nouveau sur le monde actuel. Des artistes qui ont des choses à dire sur ce qui nous entoure, qui le dévoilent sous un jour neuf.
En ce qui concerne la littérature spécifiquement, nous avons une conviction : la littérature n’est pas morte, non, la littérature est un art jeune et qui n’est pas allé au bout de ses possibles. Seulement, il y a toujours une odeur de sainteté autour du texte, une dimension sacrée, intouchable, inviolable. C’est une idée qui mérite d’être dépoussiérée. La littérature, aujourd’hui, mérite une approche nouvelle. La littérature, ça peut être beau, ça peut être fort, ça peut nous changer ; ça peut aussi être drôle, décalé, déviant. Mais dans tous les cas, ça doit être vivant et intelligent.
Tout est une histoire de ton, donc. Il y a des textes qui valent le coup, des textes que l’on veut découvrir, redécouvrir, faire découvrir, et dire : « Ça, c’est bien. »
La littérature parle encore à tous et pour tous, plus que jamais, et pour longtemps.
Tind développe une collection de T-shirts qui permettent à tout un chacun de s’habiller littéraire. Tind est donc plus qu’une revue ?
Tind c’est un studio d’édition, pas une maison mais presque ! Les Tind-shirts sont pour nous encore un moyen de faire un lien entre la littérature et la vie de tous les jours. Quoi de plus beau que de porter l’incipit de Peter Pan ou d’A la recherche du temps perdu lors des jours de grand soleil ? C’est donc plus qu’une revue, c’est une expérience du quotidien. Cela sera aussi des livres et pourquoi pas bien d’autres choses !
A quand le n°2 ?
Le numéro deux sort sur notre site le 15 juin (un peu en avance pour les abonnés qui, rappelons-le, ont toute notre reconnaissance et bénéficient donc de quelques avantages). Elle sera en librairie à la fin du mois. Arthur de Pins a réalisé la couverture, Frédéric Beigbeder a répondu à notre questionnaire de Proust et Philippe Apeloig nous fait l’honneur d’un entretien fleuve. Cela devrait vous plaire.
Je suis allée vérifier, exact, il y a le t shirt incipit proustien…
Bien évidemment je ne connaissais pas cette revue (pas demain la veille qu’elle arrive dans mon point de vente local )
Perso, j’ai choisi l’incipit de Peter Pan que j’ai fièrement porté aux Imginales et à Etonnants Voyageurs ! Et la revue, je l’ai achetée sur le net : on habite le même trou…
Tiens, il faudra que j’y jette un oeil, ça pourrait me plaire !
Oui, tout à fait : c’est éclectique, comme toi 😉
je ne connais pas non plus, à feuilleter à l’occasion!
Le numéro 2 est sorti et semble tout aussi intéressant.