Vous souvenez-vous de Maria ? Il y a quelques années, son papa, Miguel Gallardo, nous permettait de faire sa connaissance dans Maria et moi. Quelques dessins au trait, un peu d’humour et beaucoup d’amour pour nous présenter sa fille autiste, pour nous dire à quel point Maria était une enfant déroutante mais formidable. Aujourd’hui, Maria a 20 ans : elle n’a guère changé.
Maria a 20 ans est le journal de ce que nous faisons durant ce mois et demi d’été que nous passons ensemble. On rit encore beaucoup, on fait des listes et on écoute la musique choisie par Maria. Maria a grandi : certaines choses ont changé et d’autres sont restées identiques. Ce livre parle de tout ça… et du futur.
Maria redoute le changement : elle a encore besoin de certitudes et de repères. Elle pince toujours les gens, elle se met à crier de façon intempestive. Elle attire l’attention et pour Miguel son père, le regard des autres est plus pesant que jamais. Car ils ne voient en elle qu’une personne inadaptée alors que lui voudrait qu’on l’apprécie pour ses richesses. Il voudrait expliquer au monde les obsessions de sa fille, et c’est ce qu’il fait dans les bandes dessinées qu’il lui consacre.
Si Maria n’a pas changé dans ses moyens d’expression et de communication, elle a découvert la musique et le dessin : deux activités qui la rassurent. Dessiner lui permet de s’exprimer, même si parfois, il n’est pas facile de comprendre ce qu’elle veut dire. Désormais, père et fille dessinent ensemble.
Ce qui aujourd’hui préoccupe Miguel Gallardo, c’est l’avenir. Si Maria se comporte toujours comme une enfant, elle est désormais adulte et va devoir quitter l’école pour un centre de vie. Et ensuite ? Que deviendra Maria quand son père et sa mère ne seront plus là ? C’est une inquiétude qui taraude nombre de parents d’enfants handicapés : de quoi sera fait l’avenir dans une société qui ne fait pas de place à la différence ? Il regarde sa fille avec les yeux d’un père mais nous la regardons comme un problème. Heureusement, Maria a autour d’elle son « réseau d’amour » : celui de gens qui l’aiment et qu’elle aime sans méfiance.
Nous les « normaux », nous ne nous sentons pas toujours armés pour affronter la vie. On imagine donc à quel point ceux qui aiment Maria s’inquiètent pour son avenir. La belle jeune femme qu’elle est devenue n’est aujourd’hui pas autonome : sa bonne humeur, sa joie, sa vie reposent dans les mains d’autrui. C’est cette dépendance qui est son véritable handicap. Le sourire et la confiance de Maria sont si grands, si innocents…
Les vignettes naïves de Miguel Gallardo, son dessin très simple et ses anecdotes drôles et tendres sur sa fille dévoilent à la fois son amour et son inquiétude. Immenses l’un et l’autre.
Miguel Gallardo sur Tête de lecture
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Maria a 20 ans
Miguel et Maria Gallardo traduits de l’espagnol par Alejandra Carrasco
Rackham, 2016
ISBN : 978-2-87827-195-9 – 64 pages – 14 €
María cumple 20 años, parution en Espagne : 2015
tous ces gens qui acceptent de témoigner sur l’autisme ont permis, je l’espère, que notre regard change sur ce handicap si déroutant.
Miguel Gallardo le fait avec amour et humour : deux atouts très efficaces ici.
Deux BD d’un coup, puisque je découvre…
Je n’ai pas hésité une seconde à acheter la seconde quand j’ai su qu’elle existait.
Je me souviens très très bien de ton billet sur Maria et moi. J’avais très envie de le lire mais je n’ai toujours pas réussi à mettre la main dessus. Je vais reprendre mes recherches et voir si je ne pourrais pas avoir les 2 en même temps en passant !
J’avais chroniqué la première à l’occasion de Barcelone, ville invitée du Salon du Livre. A l’époque, j’ai déniché la BD d’occasion. Mais là, j’ai acheté le second tome, parce que j’ai aimé le premier, parce que Rackham est une belle petite maison et que Maria et Miguel sont formidables !
Comme Keisha, ça sera deux BD d’un coup. Ayant un neveu autiste léger, je suis d’autant plus intéressée
Je crois que tous les lecteurs s’y retrouvent : ceux qui côtoient cette maladie et les autres. Pour moi, je ne la connais pas et j’ai aussi beaucoup été touchée par le regard de ce père.