Radioscopie d’un adultère d’Edna Mazya

Radioscopie d'un adultèreIlan Ben Nathan, quarante-huit ans, est professeur d’astrophysique à Haïfa et depuis deux ans l’époux de Naomi, vingt-cinq ans. Un soir qu’il rentre plus tôt que prévu, il ne trouve pas sa jeune épouse à la maison. Commence alors ce que tous lui avaient prédit plus ou moins tacitement : il surveille sa femme, la suit, pour finir par découvrir qu’elle a effectivement un amant. Cependant, persuadé qu’il la perdra s’il parle, il décide de garder pour lui sa découverte.

Mais Ilan est du genre compliqué, voire autodestructeur ; lui même se qualifie de « pseudo-intellectuel vieillissant doté d’une inclination naturelle pour l’introspection morbide ». Aussi décide-t-il d’aller voir de plus près cet amant et de fil en aiguille finit par le tuer. Le voilà avec un cadavre sur les bras qu’il ne parvient pas à enterrer dans un jardin trop pierreux ni même à balancer à la décharge, trop fréquentée. Une seule solution : maman, qui depuis quarante-huit ans a réponse à tout.

Je n’ai pas été conquise par l’humour d’Edna Mazya. Il y a deux registres dans ce roman qui à mon avis cohabitent mal. D’une part, le drame d’un homme amoureux trompé par la femme qu’il aime. Qui dit amoureux dit égoïste et sa mésaventure lui fait prendre conscience de la personnalité complexe de son épouse : « Je suis couché et regarde ma femme aimée, ma raison d’être, songer avec nostalgie à son amant soudain volatilisé, je m’oublie à présent et tente de m’immiscer dans son esprit, pour la première fois peut-être je la regarde comme une créature avec une existence propre, j’essaie de la saisir non comme un reflet de moi-même, mais pour ce qu’elle est, m’interrogeant sur ce qui peut animer son esprit, le degré de sa conscience autonome. » Rien de telle qu’une infortune conjugale, réelle ou supposée, pour donner vie à l’autre en dehors de sa propre existence…

Le lecteur bien sûr compatit, emporté par le flot verbal et introspectif de l’amoureux blessé. Pourtant, Edna Mazya fait en sorte qu’Ilan soit plus pathétique que malheureux, le plaçant dans des situations à la limite du ridicule qui entraînent le roman sur la pente du comique. L’enterrement impossible, la mère juive, le meurtre lui-même (Ilan tue l’amant en lui enfonçant une pipe dans la bouche…), tout est fait pour que le drame du narrateur ne soit jamais tragique. C’est la juxtaposition de ces deux registres qui m’a gênée, m’empêchant finalement et de plaindre le malheureux et de rire à ses dépends. Je dois avoir une certaine tendance à préférer les drames bien noirs et bien tristes, le noir ou le blanc plutôt que le gris.

J’ai cependant apprécié le style de l’auteur qui grâce à de très longues phrases traduit le flux de pensée d’un narrateur effectivement enclin à l’introspection et au questionnement. Pas de retours à la ligne ni de guillemets pour les dialogues, le présent de narration, des phrases pouvant atteindre une demi-page : le lecteur est plongé dans la conscience tourmentée d’Ilal qui erre de suppositions en hésitations.

Convaincue par le style et non par le traitement de l’histoire, je demeure donc relativement déçue à l’issue de cette lecture.

Radioscopie d’un adultère

Edna Mazya traduite de l’hébreu par Katherine Werchowski
Liana Lévi, 2008
ISBN :978-2-86746-474-4 – 254 pages – 19 €