A l’occasion d’une rencontre furtive, un homme d’une quarantaine d’années voit resurgir son passé. C’est Fred, un des narrateurs, qui va nous raconter un an de sa vie avec Myriam et Thomas, eux aussi narrateurs tour à tour. On est au milieu des années 80, Fred est pion dans un collège où il rencontre Myriam, prof de dessin. Il est tout de suite séduit par la jeune femme qui semble lui porter attention. Mais Myriam est enceinte de Thomas et même si elle est troublée par le jeune homme, elle n’en est pas moins amoureuse du père de son enfant à venir. On voit se dessiner un triangle amoureux qui va prendre une tournure dramatique puisque le bébé meurt peu après sa naissance.
Je suis malheureusement restée à l’écart de ce livre. Certes, Jean-Philippe Blondel traite avec pudeur d’un thème terrible et fait entrer le lecteur, grâce à ses trois narrateurs, au coeur de la douleur. Ses mots sont sobres, aucun pathos n’est convoqué bien au contraire. Il ne fait pas dans le sentimental mais confie au flot de pensées intimes le soin de nous communiquer l’attente, l’amour, l’ambition, et surtout la douleur.
J’ai tenu mes bébés moi aussi dans mes bras mais à aucun moment je n’ai ressenti la douleur de Myriam en lisant ce texte. Je n’ai pas été bouleversée avec elle, je suis restée spectatrice sans jamais partager ses émotions. C’est je crois parce que cette écriture est trop sage, à la limite de la platitude. Ces personnages manquent de tripes alors qu’on les sent vivants. Ce sont des vies entières qui se jouent dans ces quelques pages et pourtant, je n’ai pas ressenti d’enjeux. Je trouve l’écriture de Blondel trop fade, elle me semble manquer d’envergure face au drame et à la violence qu’elle met en scène.
Par contre, la seconde partie m’a semblé beaucoup plus intéressante, avec ce Fred qui essaie de trouver une place dans ce couple qui a basculé mais veut rester debout, le trouble de tous les protagonistes devant le désir interdit. Je trouve Blondel plus subtil dans l’écriture de l’ambiguïté que dans l’évocation de la tragédie humaine qu’est parfois la vie.
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Passage du gué
Jean-Philippe Blondel
Pocket, 2008
ISBN : 978-2-266-17270-7 – 306 pages – 6.90 €