Club Dumas d’Arturo Pérez-Reverte

Club DumasTout commence avec le chapitre 42 du célèbre roman d’Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires. Flavio La Ponte, libraire de son état, le tient d’un éditeur, Enrique Taillefer, qui a tout récemment été retrouvé pendu chez lui : meurtre ou suicide ? Ça n’est pas le problème de Lucas Corso, chasseur de livres à gages, que La Ponte charge d’authentifier le manuscrit. Son travail se résume à trouver les bons interlocuteurs et spécialistes. Mais sa tâche s’avère bientôt double puisqu’un autre bibliophile, Varo Borja libraire à Tolède, le plonge dans le mystérieux Livre des Neuf Portes du Royaume des Ombres. Son éditeur, brûlé vif par l’Inquisition en 1666 aurait détruit tous les manuscrits sauf un. Or, il semblerait que trois soient encore en circulation et Varo Borja voudrait savoir si celui qu’il possède est bien le seul authentique.

Et voilà notre Corso parti pour Sintra, Portugal, et Paris, à la recherche de rapprochements entre les trois exemplaires de ce livre censé permettre d’invoquer le Diable. Mais le chasseur de livres va bientôt se rendre compte qu’il est suivi, en particulier par un type balafré qui pourrait correspondre à la description du méchant Rochefort des Trois Mousquetaires. Corso se persuade bientôt que le chapitre 42 de Dumas et le Livre des Neuf Portes ont quelque chose de maléfique et dangereux en commun.

Arturo Pérez-Reverte joue sur deux tableaux dans ce roman : l’enquête et l’histoire littéraire. On suit Corso, qui fait figure de fouineur, dans ses recherches, ses voyages, ses déductions, mais aussi ses erreurs. Comme il se doit, il se fait tabasser, il est menacé de mort, et séduit les femmes malgré son peu de sex appeal… Par ailleurs, on en apprend beaucoup sur la bibliophilie et Alexandre Dumas, ce qui peut être à double tranchant. Si je ne savais rien sur les différentes possibilités de falsification de livres anciens avant d’ouvrir ce livre, me voilà désormais au fait. Mais par contre, j’en savais assez sur Alexandre Dumas, sa collaboration avec Maquet et sa vie de bon vivant pour que les longs passages biographiques m’ennuient un peu, et le passage sur les sources d’inspiration de Dumas pour le personnage de d’Artagnan est carrément longuet. Je ne blâme pas la volonté d’érudition, au contraire, mais je trouve que certaines explications historiques et littéraires tournent au didactisme. D’autres passages sont assez longs, notamment ceux qui essaient de donner plus de consistance à Corso en lui fabriquant un passé et qui se révèlent totalement inutiles.

L’intrigue elle-même est cependant finement construite. J’ai mis une vingtaine de pages à comprendre qu’il me faudrait un papier et un crayon pour noter les noms de tous ces libraires et bibliophiles ibères sous peine de bouillie bien peu espagnole. Mais une fois tout ce monde-là bien en place, on suit les tâtonnements de Corso avec plaisir. Pérez-Reverte n’a pas ménagé ses efforts pour nous concocter une intrigue à plusieurs niveaux, littéraire en diable, c’est certain, et retors au possible. L’étrange point de vue narratif m’a beaucoup gênée au départ, mais tout s’explique.

Club Dumas un roman à la construction très habile dont la lecture m’aurait certainement plus réjouie s’il ne se perdait  dans de longs développements certes érudits et intéressants en eux-mêmes, mais qui plombent l’action.

Arturo Pérez Reverte sur Tête de lecture

 
Club Dumas

Arturo Pérez-Reverte traduit de l’espagnol par Jean-Pierre Quijano
Jean-Claude Lattès, 1994 (existe en poche)
ISBN : 2-7096-1398-0 – 390 pages

El Club Dumas, parution en Espagne : 1993

81 commentaires sur “Club Dumas d’Arturo Pérez-Reverte

  1. J’avais passé un bon moment avec ce livre, pas pour l’intrigue, plutôt justement pour le ton et l’ambiance. Ce ne sera pas une surprise puisque je suis particulièrement sensible aux atmosphères d’un livre, peut-être donc moins importunée par les  » longueurs  » 🙂

    1. L’ambiance d’un livre… oui… alors il va falloir que tu m’expliques des choses, parce qu’il a été question de toi et de Paterson au petit déjeuner vu que Mr Ys s’est attaqué à un second titre (oui, déjà, on n’aime pas les échecs dans la famille…) et que… on va dire que ça n’est pas vraiment concluant…

  2. J’ai aimé l’érudition (il faut dire que je ne connaissais rien de Dumas) et comme Emmyne, le ton et l’ambiance. J’adore Perez-Reverte. Sans doute l’auteur contemporain dont j’ai lu le plus de romans.

    1. Dans le genre policier historique et érudit, je préfère Le nom de la rose. Je trouve que Pérez-Reverte ne parvient pas bien à lier l’érudition au reste, c’est ce que je trouve dommage.

  3. Moi, j’avais bien aimé. Ceci dit je ne connaissais rien à Alexandre Dumas alors… Du même auteur, j’avais beaucoup aimé « Le tableau du maître flamand » qui se passe dans le monde de la restauration de tableaux anciens et des échecs.

  4. J’ai beaucoup aimé ce livre. Je l’ai lu car je n’avais rien compris au film « la neuvième porte » dont est tiré le livre. Et j’ai revu le film juste après ma lecture, je l’ai nettement plus apprécié!

    1. Je viens d’apprendre grâce au billet de Yoshi qu’il y a eu une adaptation, avec Johnny Depp en plus. Même si le film est long (et incompréhensible !) ça fait quand même une bonne raison de le voir !

  5. A l’époque, j’ai trouvé que c’était un bon livre, passionnant, amusant et quelque peu tragique ; je ne savais rien d’Alexandre Dumas, ce qui m’a un peu gênée tout de même ;ce sont les passages sur la démonologie qui m’ont semblé un peu longs.
    Au final, une lecture que je me rappelle avec plaisir. Le Tableau du maître flamand est moins ambitieux à mon avis ; les développements sur la peinture ne sont pas très originaux.

    Pour le film la Neuvième porte, je n’ai pas trop aimé Johnny Depp dans ce rôle; j’avais peine à y croire! en revanche, Emmanuelle Seigner est très bonne.

  6. Je me souviens avoir lu ce roman avec plaisir, il ne laisse aucun souvenir impérissable mais c’est de la bonne fiction, effectivment le tableau du maitre flammand est moins convaicant je suis d’accord avec Dominique
    Je vois qu’il n’y a pas que moi qui traine dans sa PAL des livres depuis plus d’une décennie !

  7. Je n’ai encore rien lu de cet auteur! Il faudrait peut-être que je commence! On parle beaucoup de Dumas et de Maquet en ce moment! Je vais voir!

  8. Je l’ai aussi dans ma PAL mais comme j’ai été déçue par le tableau du maître flamand, j’attends … et avec vos avis, je vais attendre encore. Je ne sais pas quoi mais je vais attendre.

  9. Merci pour cet article, j’y retrouve pas mal de ce qu’avait écrit un chroniqueur sur mon propre blog à propos d’Arturo Perez Reverte
    Il faut donc que je m’y mette 🙂

    1. Cet article donne vraiment envie de découvrir cet auteur, pour ma part, je suis ravie que ça soit fait, et si je n’ai pas été totalement convaincue, je recommencerai certainement.

  10. Je ne crois pas qu’il y ait matière à explications, c’est plutôt une affaire de sensibilité personnelle, c’est tout. Comme les goûts et les couleurs…Quant aux lectures de Monsieur Ys, je ne sais pas quel titre il a finalement choisi, mais autant qu’il abandonne, je ne vois pas en quoi ne pas aimer un livre ou un auteur est un échec et je m’en voudrais de gâcher un petit déjeuner, je n’ai absolument pas vocation d’apôtre.

    1. Ah bon ? Il mérite un peu plus je trouve quand même, rien que pour ce métier si spécial et pour la plongée dans le monde si fermé des bibliophiles.

  11. j’ai peur d’être déçue en raison des « longs développements » et puis, j’ai « le tableau du maître flamand » dans ma PAL !

    1. Il faut donc d’abord privilégier ton objectif PAL et ce maître flamand est peut-être pas mal, peut-être quelque chose dans l’ambiance de Tracy Chevalier, je ne sais ?

  12. Je n’ai pas trop ressenti les longueurs dont tu parles, mais, par contre, j’ai eu un peu le même problème que toi pour mettre tous les personnages en place au début! Une très bonne lecture qui m’a permis de faire baisser ma PAL!

    1. Au bout de vingt pages, je ne savais déjà plus qui était qui ! Alors j’ai vite noté tout ça pour ne pas mélanger tous ces personnages (je suis assez coutumière du fait, ma tête est une vraie passoire !).

  13. J’ai lu un livre de cet auteur (je ne me souviens pas du titre) mais je n’avais pas accrochée. Ca se passait à Séville. Peut-être que je devrais retenter l’expérience (surtout depuis que je connais cette ville)…

    1. La peau du tambour, c’est le nom de ce roman qui se passe à Séville : tous les ingrédients initiaux d’un thriller, avec un prêtre en mission, un complot contre le vatican, une femme mystérieuse et séduisante, des personnages bien campées … mais il ne se passe rien !
      Un peu décevant si on s’attend à un roman trépidant…

  14. La neuvième porte m’avait laissé un goût étrange : j’ai adoré le début, mais la fin est d’un ridicule … du coup, je ne suis pas du tout tentée par ce livre.

    1. Ah bon, c’est un film de Polanski… il n’a pas été à la hauteur ? Comme je pourrais regarder n’importe quel nanar avec Johnny Depp, je pense quand même que je perdrais volontiers deux heures à le regarder s’il me tombe sous la main.

  15. Je l’ai lu voilà bien longtemps, parce que je suis une grande fan de Dumas (même si ça ne se voit pas sur mon blog) mais j’avais déjà lu Le Tableau du Maître Flamand de lui et du coup, j’ai été moins éblouie par Club Dumas, malgré son sujet… j’avais beaucoup aimé, mais malgré tout, ma préférence va au Tableau…

    1. Chez nous vient de sortir un film qui devrait donc te plaire : L’autre Dumas (avec Depardieu, encore..) qui met surtout en scène Maquet si j’ai bien compris.

  16. Il faut reconnaître qu’il y a quelques longueurs dans ce roman de Pérez-Reverte, mais que c’est aussi et surtout un livre d’une rare érudition sur le monde feutré des collectionneurs de grimoires et autres ouvrages anciens et rares ! Il a une façon et un art de mélanger les pistes que l’on ne sait plus très vite où on en est … Le crayon à portée de main s’impose lorsque on lit un livre comme celui-ci. Malgré ses quelques petits défauts, cela avait été une bonne lecture. Et puis, il y a eu le film de Roman Polanski avec Johnny Depp, « La neuvième porte » qui est adapté – en partie – de ce roman.

    1. Le côté bibliophilie m’a vraiment intéressée, de même que cette intrigue alambiquée, je me demande comment Stephie a fait pour abandonner. C’est vraiment très bien construit.

    1. Ce sera celui-là ou Le peintre des batailles, je verrai… Il y a Alatriste qui m’aurait bien tentée mais du coup, avec ses cinq tomes, je crains que ça ne soit un peu long aussi…

  17. J’ai rencontré à peu près les mêmes difficultés que toi avec « le tableau d’un maître flamand ». Une bonne intrigue, de bonnes choses, mais une érudition un peu plombante au bout d’un moment, des passages trop longs, et un dénouement que j’avais trouvé décevant. Bref, je n’ai pas eu envie de faire une autre tentative avec l’auteur.

    1. Pas facile de trouver le bon équilibre. Il doit faire beaucoup de recherches qui doivent le passionner, il a envie de transmettre, mais il faut trouver le bon dosage, celui qui divertira le lecteur en lui apprenant deux trois choses mais qui ne plombera pas l’action.

  18. J’avais apprécié « Le tableau du Maître flamand », qui semble souffrir des mêmes défauts finalement. Donc, je ne sais pas si j’oserais me lancer dans la lecture de celui-ci. J’avais vu l’adaptation avec Johnny Depp mais je n’en garde pas un souvenir fulgurant. Cela dit, pas sûr que Johnny Depp corresponde à « séduit les femmes malgré son peu de sex appeal » hihi

    1. C’est certain, il ne correspond pas vraiment à l’idée que je me faisais de ce Corso ! Johnny Depp, on ne s’étonne pas qu’il emballe tout le monde !

  19. Ce livre est dans ma PAL grâce au swap Book inside 😉
    J’avais été déçue par « Le tableau du maître flamand » : c’était une lecture agréable mais j’en attendais beaucoup plus… Ceci dit, je ne joue pas aux échecs, c’est sans doute une des raisons pour lesquelles je n’avais pas plus adhéré que ça au livre… 😉

  20. Si vous aimez le mélange « roman d’aventure  » et  » policier » , la Peau du tambour est une bonne idée de lecture. Je le recommande!

    Le Peintre de batailles est un livre ambitieux le portrait d’un artiste raté, photographe et peintre,la longue méditation d’un solitaire, et son passé qui vient le rattraper sous la forme d’un ennemi dont il a brisé la vie sans le savoir.
    Ce roman comporte aussi des longueurs mais il en vaut la peine…

  21. « et séduit les femmes malgré son peu de sex appeal… »

    Freud a écrit: « Mais que veut la femme? »
    Persoone ne sait ce qu’une femme recherche dans un homme.

    1. Il est questions dans ces livres de très vieux manuscrits qui ont des centaines d’années. Quand je vois l’état de mon livre qui a donc une quinzaine d’années, je me dis qu’il fera tout au plus trente ou quarante ans avant de ne plus être lisible du tout, c’est bien triste…

  22. Je vois qu’il y a eu des abandons de lecture… et toi même, même si tu es allée au bout, tu relève des longueurs dans le récit.
    Pas très courageuse, je ne note pas ce titre ! 🙂

  23. Ton avis rejoint un autre que j’ai lu je ne sais plus sur quel blog. Mais comme je viens de voir « l’autre dumas »au ciné, je lirais bien ce livre pour l’intrigue et pour en apprendre un peu plus.

    1. Je suis allée voir « L’autre Dumas » aussi finalement et vraiment, je ne trouve pas que ce soit un bon film : l’image est affreuse, les acteurs juste passables et l’intrigue insignifiante… je suis déçue…

  24. aaaaaahhhh il n’est PAS trop LONG, il est parfait ce livre, je l’aime comme ça, c’est un de mes préférés, je l’ai lu des dizaines de fois, on enlève rien :-)))))

  25. Je suis tout a fait de ton avis – histoire passionnante mais on s’y perd un peu. Par contre, j’avais beaucoup aime ‘Le tableau du maitre flamand’. Une intrigue tres prenante

  26. Alors celui-ci j’ai adoré. Tant par l’histoire que par le mystère qui plane dans ce livre. Du même auteur « Le tableau du peintre Flamand » n’est pas mal non plus.

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