La lecture de plusieurs billets en demi-teinte a refroidi mon enthousiasme de départ pour Le jardin du Diable. Mais tous s’accordaient pourtant à apprécier la restitution de l’ambiance hollywoodienne du tout début des années 20 (même si on n’y est pas allé, et encore moins à l’époque, on a tous notre petite idée du milieu). Pour moi, les romans sur Hollywood c’est La conspiration des ténèbres de Theodore Roszak, ou bien encore Le Dahlia noir, de James Ellroy, que de la grosse pointure. Ace Atkins partait donc avec un handicap : faire aussi bien.
Le jardin du Diable n’a pas pour sujet l’industrie du cinéma, mais bien la vie dépravée des acteurs et actrices qui boivent (pendant la Prohibition…), forniquent, se droguent, se trahissent et se détestent. Hollywood, c’est le jardin du Diable… Mais sur la côté Ouest, la dépravation et la luxure ne sont pas l’apanage des seuls gens de cinéma : ceux de la police, de la justice et du journalisme ne sont pas en reste, Roscoe « Fatty » Arbuckle va s’en rendre compte à ses dépends. Star comique du cinéma muet, il n’est pas le dernier à organiser des parties plus ou moins fines et bien arrosées. Lors de l’une d’elles, une jeune actrice est blessée et succombe peu de jours après. Fatty est accusé d’avoir entrainé sa mort en l’écrasant de son poids d’ivrogne obèse pendant une partie de jambes en l’air. La presse, celle dirigée par Randolph Hearst, se déchaîne contre lui. On comprend bientôt qu’il est victime d’une machination visant à ruiner sa carrière.
La police mène son enquête, mais c’est celle de Sam Hammet que suit le lecteur. Employé chez Pinkerton, célèbre agence de détectives, Sam est plus que pauvre, tuberculeux suite à la Première Guerre mondiale, et sur le point d’être papa. Si son portrait était un peu plus développé, on s’attacherait presque à lui, le futur écrivain. Mais comme les autres personnages, il est trop succinctement dessiné à mon goût, on ne sait pas grand-chose de son passé, de ses aspirations et de ses relations avec sa femme, par exemple. Roscoe Arbuckle est esquissé du même trait, quelques contours sans vraiment de consistance. Comment vit-il son métier d’acteur, comment est-il arrivé là, que ressent-il alors qu’il est emprisonné ? On n’en saura rien. Ace Atkins a choisi d’écrire comme on filme, en enchaînant les scènes, laissant glisser sa caméra à la surface des êtres sans les approfondir. Il fait donc merveille dans les descriptions de ce monde volage et futile où les fêtes succèdent aux fêtes, le strass aux paillettes. De même, les scènes de tribunal sont réussies. Mais l’intrigue, une fois qu’on a rapidement compris que Roscoe Arbuckle est victime d’un coup monté, devient presque inintéressante et de fait, la résolution n’est en rien surprenante.
Le principal intérêt de ce roman réside donc dans son aspect documentaire, qui nous plonge dans ce milieu baigné de pots de vin, de compromissions, d’alcool et de brouillard. La fiction se mêle avec naturel à la réalité mais ne parvient cependant pas à créer une intrigue vraiment prenante, à l’instar des romans précédemment cités.
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Le jardin du Diable
Ace Atkins traduit de l’anglais par Christophe Mercier
Le Masque, 2011
ISBN : 978-2-7024-3465-9 – 461 pages – 21,50 €
Devil’s Garden, parution aux Etats-Unis : 2009
Bon, malgré ton avis un peu mitigé, je le note quand même car j’adore cette époque alors je pense que le côté « documentaire » suffira à m’intéresser 😉
C’est bien possible, moi-même, je l’ai lu sans déplaisir (mais sans passion non plus…).
Pas tentée … je passe !
Si l’intrigue n’est pas prenante, au moins a-t-il un intérêt historico-documentaire.
C’est ce qui m’a fait le lire jusqu’au bout.
Bonjour
Moi aussi j’ai ressenti cette même impression de superficialité dans le traitement du sujet, quant à l’intérêt historico-documentaire ce n’est juste qu’une évocation sans plus. Dans le domaine des romans policiers ayant pour sujet le cinéma je conseille de lire les ouvrages de Stuart Kaminsky et son privé Tobby Peters, des romans nettement plus enlevés et attrayant dans tous les domaines surtout celui de l’intrigue et de la description des personnages fictifs et réels.
Amicalement
Merci beaucoup pour ce conseil que je m’empresse de noter… et je consulte le catalogue de la bib : 3 titres disponibles !
j’aime beaucoup tout ce qui tourne au cinéma de cette époque
mais ton manque d’enthousiasme me refroidit un peu 😉
Oui, toi qui regardes tant de vieux films, ce livre pourrait te plaire, si tu ne t’attaches pas trop à l’intrigue…
Pas spécialement tentée. Mais en ce moment, rien ne me tente, bizarre !
Pas envie de lire ? L’effet printemps peut-être…
Le titre de ce roman et le thème m’attiraient mais ton avis me refroidit un peu…
J’en ai mis d’autres en lien, certains sont plus enthousiastes que d’autres…
Je n’ai pas lu le dahlia noir et je l’ai depuis un moment dans ma Pal. j’ai trouvé, comme tu sais assez décevant le jardin du diable et j’espère que Ellroy me plaira davantage…
C’est impossible autrement : Ellroy, c’est du grand art !
ça ne me tente pas trop!
Pas spécialement tentée… il faut dire que du polar, j’en ai vu des tonnes ces jours-ci, du bon, et même du très bon !
Ah oui, Jo Nesbo…hum hum, ça va venir….
De ton billet, je retiendrai qu’il faut que je lise La conspiration des ténèbres, noté depuis longtemps sur ma liste.
Il le faut absolument en effet, c’est un très grand livre à mes yeux.