L’existence de On les aura ! tient du hasard : Barroux trouve un jour sur le trottoir parisien le carnet de guerre d’un soldat et décide de l’illustrer. Du 3 août au 12 septembre 1914, ce soldat inconnu écrit son quotidien, depuis sa mobilisation à son hospitalisation à Auxerre. Et puis plus rien : on ne saura ni qui il est ni ce qu’il est advenu de lui.
On les aura ! , récit de guerre à la première personne, est très factuel : on suit les faits et gestes de notre poilu qui quitte sa famille, rejoint son cantonnement, sa caserne, traverse de nombreux villages, a mal aux pieds. Durant les premières semaines, il n’approche pas la guerre de près, entend au loin le bruit du canon, et s’ennuie à répéter les mêmes manœuvres. Ce n’est que le 22 août 1914 (la journée la plus meurtrière de la Grande Guerre), qu’il participe à ses premiers combats, tout près de la frontière belge. Parce que son bataillon se sort indemne de ce premier assaut, il conclut que « l’artillerie allemande n’est pas si meurtrière que ça ».
Mais c’est bientôt la déroute, la fatigue et une blessure au bras.
Grâce à ce témoignage de première main, non destiné à la publication, et que Barroux a conservé intact, le lecteur approche le quotidien du soldat. Dans son aspect pratique d’une part, mais aussi dans ses sentiments, ses inquiétudes : le soldat au front s’inquiète pour ceux qu’il a laissés derrière lui et surtout, il ne sait pas ce qui se passe. Les Allemands sont-ils à Paris ? L’armée française écrase-t-elle les Prussiens ? Où va-t-on dormir ce soir ?
Le texte de On les aura ! ne travaille pas sur l’émotion ou les sentiments, il rend juste compte d’un quotidien. Le dessin de Barroux, au crayon noir très épais et à la mine de plomb va lui aussi à l’essentiel avec deux cases par page, renforçant la solitude (beaucoup de grands espaces). Le dessin donne consistance aux mots du soldat, à la chaleur, à la pluie, aux maux de pieds, aux gestes de fraternité. Il crée une atmosphère, non pas au cœur des combats et des tranchées mais dans une angoisse constante.
A lire : l’interview de Barroux. La thématique Première Guerre mondiale sur Tête de lecture
On les aura ! carnet de guerre d’un poilu (août – septembre 1914)
Barroux
Seuil, 2011
ISBN : 978-2-02-104445-4 – 93 pages – 16.50 €
Une idée de départ originale pour un résultat très tentant.
Ce hasard est vraiment étonnant : une belle découverte qui a déclenché la création…
Le dessin me plaît beaucoup !! Je note, je note…
Sombre sans être pesant ou écrasant.
Je l’avais présenté sur un site de littérature jeunesse. J’avais beaucoup aimé, le trait charbonneux de Barroux s’accorde très bien au texte je trouve.
J’ai cru comprendre que cette BD a été publiée en jeunesse mais ce n’est pas clair sur l’album lui-même…
j’aime assez le dessin et je suppose qu’il est en pleine harmonie avec le thème…
Tout à fait. Et le fait que le dessin se développe sur des cases relativement grandes évite de tout écraser et assombrir démesurément.
Je le note. Un point de vue dont on n’a pas l’habitude.
Un authentique carnet de guerre en BD, je n’en avais pas lu.
j ai beaucoup lu sur le sujet, et celui-là ne m’attire pas trop , tout en trouvant le dessin plaisant
Luocine
J’essaie de varier le plus possible et il faut bien dire qu’on a l’embarras du choix en graphisme concernant la Première Guerre mondiale.
Le dessin me plaît beaucoup, tout en douceur et en retenue. Je note !
Je l’ai apprécié aussi, malgré l’épaisseur du trait qui au départ m’a fait un peu peur.