Galveston de Nic Pizzolatto

GalvestonMagnifique ciel lourd de nuages au-dessus d’une ligne droite menant probablement vers nulle part, cette couverture laisse envisager le meilleur de la littérature américaine à mes yeux : l’errance, le tourment, la fatalité. Nic Pizzolatto, jeune auteur originaire de La Nouvelle Orléans, pourrait être de ceux qui construisent le grand roman américain.

Quand on fait sa connaissance, Roy a quarante ans et il vient d’apprendre qu’il a un cancer du poumon très avancé. Il fait fonction d’homme de main pour un truand local : il encaisse des paris et rappelle aux débiteurs que leur échéance est passée. Des rappels toujours musclés. Jusqu’au jour où il tombe dans ce qui ressemble fort à un traquenard, organisé par son patron lui-même, celui pour qui sa femme est partie. Roy parvient à s’enfuir, laissant plusieurs cadavres dans son sillage. Il emmène avec lui Rocky, jeune prostituée de dix-huit ans qui se trouvait sur les lieux. Il a l’intention de la déposer quelque part loin des types qui les poursuivent et de filer se planquer lui-même, probablement au Texas, à Galveston où il a jadis passé de bons moments, les seuls de sa vie. Mais Roy n’est pas qu’une brute, il n’arrive pas à abandonner Rocky à son sort. D’autant plus que la jeune femme lui demande de faire un détour par la maison où elle a grandi et où vit encore son beau-père : elle ramène Tiff, sa jeune sœur de trois ans et demi. La petite famille arrive dans un motel pouilleux…

Galveston, c’est le parcours d’un homme, un type marqué par la vie dès le départ, un père généreux qui meurt accidentellement, une mère suicidée, un foyer d’accueil aux méthodes difficiles. Et des femmes qui partent parce que trop d’alcool, pas d’ambition ni d’avenir. Un solitaire donc, un coriace avec une épaisse carapace autour du cœur pour ne plus souffrir. La jeunesse et le désespoir de Rocky, la vitalité de Tiff vont l’apprivoiser, il va vouloir les sortir de là, leur donner une chance.

Une histoire forte et un personnage fracassé comme je les aime, pour une histoire dense et intense. Chaque geste est décrit, chaque détail, le vent, la poussière, la couleur du gyrophare, des poils de lapins, du sable sur la plage. L’intérêt bien sûr, c’est Roy, un vraiment sale type, un violent alcoolique, un de ces Blancs miséreux qu’on croise de plus en plus dans la littérature américaine contemporaine. Un oublié du rêve qui va peu à peu changer et essayer de faire quelque chose pour quelqu’un, pour rien, parce que c’est elle. La rédemption donc, le sujet n’est pas nouveau mais souvent très fort.

Ici, Nic Pizzolatto soigne l’ambiance mais la mince intrigue s’étire un peu. L’âpreté évoquée s’accommoderait plutôt de concision, à moins de renforcer l’intrigue et la consistance des personnages secondaires. Roy et Rocky forment un couple improbable, deux cabossés qui se soutiennent l’un l’autre, hésitent à se livrer et pourtant saisissent le lecteur par leur humanité.

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Galveston

Nic Pizzolatto traduit de l’américain par Pierre Furlan
Belfond, 2011
ISBN : 978-2-7144-4700-5 – 320 pages – 19 €

Galveston, parution aux Etats-Unis : 2010

25 commentaires sur “Galveston de Nic Pizzolatto

    1. Très oui, trop, ça a bien failli, mais finalement il ne tombe pas dans l’excès de clichés, peut-être parce que le livre est assez court.

    1. Je crois que c’est à l’émission « Cercle polar » que j’ai repéré ce livre, puis la couv’ a emporté mon adhésion.

  1. Assez d’accord avec toi. Il y a un bon personnage, une bonne intrigue mais peut-être fallait-il plus de concision ou une autre construction.

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