Homer et Langley Collyer sont frères, tous deux nés un peu avant le début du XXe siècle. Tout les prédestinait à une vie aisée de new-yorkais : père médecin, domestiques en nombre, maison sur la 5e Avenue. Mais rien ne se passe comme prévu : à vingt ans, Homer, le narrateur, devient aveugle tandis que Langley, de deux ans son aîné, part faire la guerre en Europe. Ils ne vivront dès lors pas la vie écrite pour eux, se renfermant toujours plus dans leur maison qui se transforme peu à peu en musée de tout et de rien.
« A cette époque de nos vies, la maison était un labyrinthe de sentiers hasardeux, plein d’obstructions et de nombreux culs-de-sac. Avec assez de lumière, on pouvait s’y retrouver dans les corridors qui zigzaguaient entre les ballots de journaux, ou se frayer un passage en se faufilant parmi les piles d’équipement de l’une ou l’autre espèces – entrailles de pianos, moteurs embobinés dans leur cordon d’alimentation, caisses à outils, tableaux, pièces de carrosserie de voitures, pneus, chaises empilées, tables superposées, têtes de lit, , tonneaux, éléments démontés du mobilier de nos parents, tapis enroulés, tas de vêtements, bicyclettes – mais pour passer d’une pièce à l’autre sans se tuer il fallait les dons innés d’un aveugle capable de sentir où se trouvent les objets à l’air qu’ils déplacent. »
Sans oublier la Ford T dans le salon…
Fatalement, les deux frères font figure d’excentriques, s’attirent les inimitiés de leurs voisins. Il faut dire qu’ils ont le don de regrouper autour d’eux des gens ne correspondant pas vraiment au standing de la rue. Alors que leur vieille cuisinière héberge son petit-fils musicien, ils décident d’organiser des thés dansants qui dérangent les voisins. Grand amateur de musique, lui-même joueur de piano, Homer découvre la musique noire avec enthousiasme. Plus tard, c’est la guitare électrique qui s’introduira chez lui. Car la porte s’ouvre aux Noirs comme aux Hippies, les employés du gaz et autres nombreux créditeurs sont par contre laissés à la porte.
Ainsi les frères Collyer voit-ils défiler toute sorte d’indésirables, de l’ardente bonne hongroise, au couple de domestiques japonais, jusqu’à Vincent le tueur de la mafia italienne. Langler n’en poursuit pas moins l’œuvre de sa vie : créer « un journal éternellement en cours et toujours d’actualité » en compilant quotidiennement la presse. Parce que rien n’est unique et que tout est remplaçable, il peut exister un journal unique qui rendra compte de tout ce qui se passe de part le monde.
« Il voulait réaliser une description définitive de la vie américaine en une édition unique, ce qu’il appelait le numéro non daté et d’une actualité éternelle du Collyer’s Journal, celui qui pourrait désormais, à lui seul, satisfaire à toutes les exigences.«
Langler ne se contente pas d’être une partie du tout, il vaut être la globalité, embrassant en cela une certaine volonté américaine de puissance et de domination. Mais il a laissé ses rêves et sa santé sur les champs de bataille européens et son activité compilatrice ne servira qu’à enterrer petit à petit les deux frères définitivement inaptes à tout rôle social.
Sur un ton globalement comique, E.L. Doctorow raconte ces deux frères inadaptés qui sont comme des symboles d’une Amérique qui ne va pas de l’avant, se referme sur elle-même jusqu’à s’enterrer sous l’accumulation de biens inutiles, jusqu’à perdre tout contact avec l’extérieur. Cette épopée du matérialisme pourrait être tragique si elle n’était heureusement si drôle.
Homer & Langley
E.L. Doctorow traduit de l’anglais par Christine Le Bœuf
Actes Sud, 2012
ISBN : 978-2-330-00575-7 – 228 pages – 22 €
Homer & Langley, parution aux Etats-Unis : 2009
Je ne te sens pas très enthousiaste… et ma LAL ne s’en portera pas plus mal !
Le lecture de la vie de ces deux doux dingues est assez plaisante, même si j’aurais aimé plus d’ampleur, peut-être une centaine de pages de plus pour mieux connaître les frères et ces gens si particuliers qui défilent dans leur si particulière demeure.
Un livre dont on n’ a peu parlé et c’est bien dommage !
Eh oui, un livre de plus noyé dans les parutions…
il y a quelque chose qui me retient , je ne sais pas trop quoi .
Mais il faut avoir beaucoup beaucoup de talent pour ne pas ennuyer le lecteur à la description de l’originalité
moi je laisse tomber , je sens que je ne vais pas apprécier jusqu’au bout
merci de ton billet
Luocine
Ces deux marginaux sont assez touchants, à côté de la plaque tout en restant des observateurs lucides. L’auteur choisit l’humour ce qui à mes yeux évite l’ennui.
J’hésite aussi même si le thème et son traitement ont tout pour me plaire. Peut-être à voir au moment où il sortira en poche.
Moi, dès que j’ai vu la couverture, j’ai eu enviede le lire. Et je ne le regrette pas.
Je voulais te souhaiter une bonne année 2013 avec un maximum de douceur , et de rencontres et de la force pour les inévitables batailles à mener.
Merci Anis. Avec un beau programme de lectures, je suis prête à
affronterlaisser passer toutes les batailles 🙂En le voyant en librairie, j’hésitais. Ton billet me donne envie d’essayer – surtout si c’est drôle 🙂 merci.
je te souhaite une bonne lecture.
je ne suis toujours pas tentée, pourtant je l’ai eu en mains trop souvent !
Moi, rien que la couv’ me plait… l’intérieur confirme…
Je me laisserais bien tenter…
Tu peux, c’est un bon moment, c’est deux frères sont vraiment originaux.
Ce livre m’attire beaucoup et ce côté doux dingue et excentrique des deux frères me plaît beaucoup. J’ai vu des photos de leur maison après leur mort, c’était réellement dingue !
Un peu de folie douce, c’est tentant. Et je vais cherche ces images tiens, ça doit être impressionnant en effet.
Je te souhaite une très belle et bonne année 2013.
Tous me svoeux.
Alex
A toi aussi Alex, fidèle commentatrice de ce blog.
Je l’ai emprunté à la bibliothèque car l’histoire m’intriguait beaucoup. J’ai finalement dû le rendre sans avoir eu le temps de le lire, mais dès que je le peux, j’irai le rechercher à la biblio !
ça m’arrive assez souvent aussi : j’ai les yeux plus gros que le ventre en matière de lecture…