Le capitaine Alatriste de Arturo Pérez Reverte

Le capitaine AlatristeLire Le capitaine Alatriste, premier volume des aventures du capitaine Alatriste, c’est plonger, ou plutôt s’immerger dans le Siècle d’Or espagnol. En ces années 1620, il est encore grandiose mais déjà décadent, déjà rongé et même dévoré par les profiteurs et les inconséquents qui causeront la ruine du pays pour de nombreuses années.

Le narrateur, Iñigo Balboa est encore un tout jeune garçon. Son père s’est battu aux côtés de Diego Alatriste qui lui a promis sur son lit de mort de s’occuper de son fils. Voilà donc l’innocent Iñigo qui entre au service de l’ancien soldat, qui n’a de capitaine que le nom puisqu’il n’est même plus sergent. Et pour l’heure, il n’est plus soldat non plus puisqu’il a été blessé et qu’une trêve a été signée avec les Hollandais. Pour gagner sa vie, Alatriste se fait sicaire : il rosse et tue sur demande, contre monnaie sonnante et trébuchante.

Et voilà qu’on l’engage, lui et un homme de main italien nommé Malatesta, pour malmener deux voyageurs anglais. Etrange contrat puisque les commanditaires de noble apparence restent masqués, et que l’ordre donné par deux hommes est contredit aussitôt qu’un des deux s’en va et qu’entre en scène rien moins qu’Emilio Bocanegra, très redoutable inquisiteur. Le capitaine Alatriste a pour contrordre de tuer les deux voyageurs.

Alors qu’il est sur le point d’accomplir la mission pour laquelle il a été très grassement payé, Alatriste hésite puis renonce : l’un des deux Anglais demande grâce pour l’autre et ce geste le surprend. Il ne lui faudra guère de temps pour apprendre qu’il a ainsi sauvé la vie de Charles, héritier du trône d’Angleterre et du futur duc de Buckingham. Le jeune prince est venu à Madrid incognito pour voir sa promise, la sœur du roi d’Espagne Philippe IV, dont on lui promet la main depuis des lustres. Il est protestant, elle est catholique. A l’évidence, quelqu’un ne veut pas de ce mariage, au point vouloir la mort du futur roi et au risque de déclencher une guerre.

Pour cette première aventure, Diego fraie avec le gratin de la noblesse espagnole. Il faut dire qu’il a des amis bien placés, et beaucoup d’ennemis déterminés. Le fil sur lequel il marche est donc étroit, demande d’être toujours sur ses gardes et de savoir se battre. Avoir un petit page bien malin n’est pas de trop non plus.

Bien que le contexte historique soit primordial, il n’est pas nécessaire d’avoir beaucoup de connaissances avant d’entamer cette série. Arturo Pérez Reverte explicite sans lourdeur la situation politique, la place encore prépondérante de l’Espagne sur le plan international, tout en dessinant les prémices de sa prochaine décadence. Le jeune roi Philippe IV, manipulé par le comte d’Olivares conduit le pays à sa perte, « gaspillant l’or et l’argent de l’Amérique en vaines fêtes, enrichissant fonctionnaires, hommes d’église, nobles et favoris corrompus, jonchant d’hommes valeureux les champs de bataille de la moitié de l’Europe ».

Arturo Pérez Reverte fait une grande place à la littérature et à l’art en général. Son capitaine est l’ami entre autres du dramaturge et poète Lope de Vega, ensemble ils fréquentent tavernes et théâtres. La vie culturelle est dense, fougueuse, à l’exact inverse de la rigueur protocolaire de la monarchie espagnole. Dans ce monde où l’honneur prime sur tout, on se bat en duel pour un sonnet, on paye de sa vie l’offense d’un vers.  Bien qu’il ne soit plus tout jeune au moment où commence le récit de ses aventures par Iñigo Balboa, le bretteur vétéran de la guerre de Flandre ne manquera donc pas d’emploi.

Agustin Diaz Yanes adapte plusieurs volumes de la série dans son film Capitaine Alatriste.

Arturo Pérez-Reverte sur Tête de lecture.

 

Le capitaine Alatriste

Arturo Pérez Reverte traduit de l’espagnol par Jean-Pierre Quijano
Seuil, 1998
ISBN : 2-02-033997-8 – 215 pages

El Capitán Alatriste, parution en Espagne : 1996

14 commentaires sur “Le capitaine Alatriste de Arturo Pérez Reverte

  1. De cet auteur, j’avais particulièrement aimé « Le tableau du maître flamand » et sa plongée dans le monde de la rénovation des peintures et dans celui des échecs. Je n’ai jamais osé Alatriste. Grâce à toi, peut être maintenant 🙂

    1. Il pratique dans différents genres (avec une préférence pour l’historique) et son écriture est vraiment agréable.

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