A l’évidence, ce roman de Edna O’Brien et moi n’étions pas faits l’un pour l’autre. Je l’ai senti dès les premières pages. Deux jours et cent vingt pages plus tard, c’est l’abandon et une sensation d’échec.
L’énonciation choisie par Edna O’Brien n’est pas confortable. Quel que soit le roman, elle ne l’est jamais. Je me souviens de ma difficulté première à lire La Modification de Michel Butor (mais peut-être était-ce dû au fait que justement, j’étais en Première, car lu ensuite à trente ans, j’ai beaucoup apprécié ce livre) : « Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayer en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant… ».
Edna O’Brien choisit elle aussi la deuxième personne pour interpeller une petite fille. C’est elle que le lecteur suit tant bien que mal au quotidien, dans sa vie familiale dans l’Irlande des années 40.
Pour ne rien faciliter à son lecteur, Edna O’Brien n’identifie pas toujours clairement les protagonistes évoqués qui sont parfois juste « il » ou « elle » et intègre les dialogues au récit sans le moindre tiret. Tout ça pour une description très factuelle. Sans empathie ni sentiment. A des kilomètres de ce que décrit la trompeuse quatrième de couverture : « un flot d’émotions, d’impressions et d’images unique car né de la souffrance du souvenir ».
« Il s’assit sans ôter son chapeau. Elle ajouta une bonne mesure de thé à la graisse de la casserole, et versa la sauce dans son assiette. Au moment de se mettre à manger il te dit de manger. Tu dis que tu n’avais pas faim. Il te dit Mange ta soupe. Tu dis Oui. »
Ce qui donne un rythme et une narration extrêmement monotones où l’émotion n’a pas prise. Aucun de ces personnages ne prend vie, ils restent étrangers au lecteur. Il y a pourtant matière : une institutrice qui se suicide, un père ivrogne, une mère qui quitte le foyer, une sœur aînée qui se prostitue… autant de motifs qui font tâches dans le tableau de bons catholiques que l’Irlande d’alors voulait refléter. C’est, ce me semble, ce qu’Edna O’Brien dénonce.
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Une lecture dans le cadre de la série d’émissions L’Europe des écrivains sur Arte. Aujourd’hui : l’Irlande avec Robert McLiam Wilson, Roddy Doyle, Colm Toibin et Edna O’Brien.
Une bibliographie d’Edna O’Brien.
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Les païens d’Irlande
Edna O’Brien traduite de l’anglais par Roger Giroux
Fayard, 1996
ISBN : 2-213-59662-X – 232 pages
Je regarderai avec intérêt ce documentaire sur l’Irlande… Par contre ma seule tentative avec Edna O’Brien s’est soldée par un abandon aussi (et encore plus prématuré, de quoi ne pas écrire de billet) Il s’agissait de Crépuscule irlandais… Tu aurais sans doute été plus emballée par un des trois autres auteurs présentés, mais sans doute les as-tu déjà lus.
L’idée, c’est vraiment de découvrir et Edna O’Brien, je ne la connaissais pas du tout. Je dois arriver à Strasbourg vers 22 heures ce soir, j’espère que je pourrai regarder cet épisode à l’hôtel ou qu’il sera ensuite visible en streaming…
je n’ai lu d’elle que Crépuscule irlandais: un lecture en demi-teinte..
Je ne suis pas sûre de retenter avec cette auteur… à moins que le documentaire me persuade du contraire…
Je n’ai rien lu d’elle encore. Aurais-tu un titre préféré de cette romancière?
Eh bien non, c’était une première.
les effets de style dans une langue étrangère c’est toujours plus compliqué , mais il faut parfois être en très bonne forme pour accéder à une littérature triste et exigeante.
Je sais que je n’irai par vers ce livre exactement pour les raisons que tu décris en pensant en même temps que cette écrivaine a sans doute quelque chose d’important à nous dire.
Luocine
Pas du tout tentée par cette romancière. J’espère pouvoir finir à temps le roman que je lis pour ce rendez-vous !
J’espère que le documentaire a donné envie de la connaître. Je l’ai raté (train en retard), j’espère le voir en streaming.
Tu n’es pas la première à avoir un avis négatif sur ce roman, pourtant j’avais envie de découvrir l’auteur. Je vais regarder le documentaire ce soir (et les suivants ..)
Je n’avais pas lu d’avis avant, j’ai choisi au hasard à la bibliothèque.
C’est Crépuscule irlandaus du même auteur qui m’avait déçue. J’ai nettement préféré son autobiographie.
Peut-être que le romanesque ne lui va pas…
Je suis en train de lire son autobio qui a l’air de beaucoup ressembler à ce que tu décris, je n’ai lu que 150 pages, c’est assez lent et décousu, j’ai aussi le sentiment qu’elle veut dénoncer certains points de cette irlande catholique. Je ne peux pas dire que je m’ennuie, mais comme toi, je trouve que c’est très factuel et que ça manque d’émotion…mais j’attends de le finir pour en être certaine
ça n’est pas bien engageant…
Ah dommage, j’avais bien aimé La maison du splendide isolement, mais c’est relativement lent. J’en ai deux d’elle en attente, mais l’Irlande pour aujourd’hui c’était un peu court.
Tu es comme Cynthia, plutôt optimisme… je trouve que le bonheur arrive vraiment très très tard…
La semaine prochaine, c’est l’Italie : commence tout de suite 🙂
Bah, ça arrive des fois. Il ne faut pas rester sur un échec.
Comme tu n’es pas la seule. je ne vais donc pas augmenter ma LAL.
Amicalement
Le Papou
remarque que je suis déçue. Je ne doute pas qu’Edna O’Brien soit une grande auteur, et donc j’en conclus que je n’ai pas été à la hauteur de cette lecture.
Oups mais que cet extrait est donc indigeste 🙂 sans moi donc 🙂
C’est écrit tout du long comme ça, c’est aussi pourquoi j’ai abandonné…
Bon ba je passe mon tour!