Puisque c’est de contes qu’il s’agit, tout commence par « Il était une fois… » et s’achève par « ils se marièrent, vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Entre ces deux clins d’œil incontournables, beaucoup de jeunes filles dévorées, d’enfants abandonnés, un chat botté et des mystères au cœur du massif alpin en cette toute fin de XVIIe siècle.
Une jeune fille qui semble avoir été dévorée par un loup, puis recouverte d’une cape rouge ; un couple d’indigents retrouvés enlacés et étranglés dans un fossé, la bouche pleine de petits cailloux blancs. Guillaume de Lautaret, qui vient d’acheter sa charge de procureur craignait de s’ennuyer dans la vallée de ses ancêtres, mais voilà que les morts se multiplient. Médecin et chirurgien ont beau conclure à une agression due au loup pour la jeune fille, le jeune procureur doute. De même que Delphine d’Orbelet qui vit depuis peut à Seyne où sa mère s’est réfugiée pour fuir les persécutions contre les Jansénistes.
Parce qu’il est aussi question de religion dans Les nuits blanches du Chat botté : entre révocation de l’Edit de Nantes et répression, la cour se fait de plus en plus austère et intolérante. Huguenots et jansénistes se cachent donc et font à l’occasion de bons boucs émissaires. Heureusement pour la justice, Guillaume de Lautaret n’est pas bigot. Il n’est cependant pas exempt d’un certain nombre de défauts dus à son rang : il apparait désagréable et sûr de lui, mais la jeune Delphine va se charger de lui en remontrer côté déduction. Ce qu’il va lui enseigner lui est d’un autre ordre…
Dans la veine des romans de Christophe Estrada, Frédéric Lenormand ou Jean-François Parot, Les nuits blanches du Chat botté est de ces romans qui, entre Grand Siècle et Siècle des Lumières, trouvent dans la mise en place de services de police dignes de ce nom un terreau et une époque fertiles. Les temps sont encore aux croyances obscures et aux superstitions, la religion pèse de tout son poids sur les êtres, mais raison et perspicacité sont des armes supérieures portées par des hommes d’action. Et parce que les écrivains d’aujourd’hui ne sauraient se montrer trop misogynes, ces hommes sont accompagnés de femmes au moins aussi malignes qu’eux, si ce n’est plus.
C’est aussi à un épisode assez méconnu de l’histoire littéraire que nous convie Jean-Christophe Duchon-Doris avec la rédaction des Contes de la mère l’Oye : compilés comme chacun sait à partir de la tradition orale par Charles Perrault, ils auraient cependant été écrits par son fils, qui les aurait lui-même tenus de sa nourrice. Ce mystère littéraire alimente aussi l’intrigue qui promène le lecteur d’un soupçon de fantastique (loup-garou ?) à une pincée d’érotisme qui tranche avec la pudibonderie habituelle du roman policier historique. A lire donc.
Les nuits blanches du chat botté
Jean-Christophe Duchon-Doris
Julliard, 2000
ISBN : 2-260-01518-2 – 239 pages -18 €
J’avais aimé et le côté « croustillant » ajoute du piment à l’histoire…
J’en conclus que toi aussi tu as trouvé ça plus explicitement érotique que d’autres romans policiers historiques… qui bien souvent ne comportent d’ailleurs aucune scène de sexe, érotique ou pas…
J’avais carrément été surprise ! puis ça va bien à l’époque. Je n’ai pas trouvé déplacé et comme je te le dis, ça épice et retient notre attention…
Un joyeux mélange de genres !
Ça reste avant tout un roman policier historique.
Je suis attirée par le côté original mais mon manque d’attrait pour la période me freine.
Ce qu’il importe de connaître ici, ce sont les contes, le contexte n’est sinon pas primordial et ne demande pas de connaissances poussées. Il faut juste aimer le roman historique…
tiens, tiens, des contes. Et comme je les connais pas mal… je pense que ça peut me plaire. Surtout si ça ose un peu!
Toutes les références tomberont dans l’oeil d’une experte : ce livre te plaira.
Je garde un excellent souvenir de cette lecture, un des meilleurs de la série !
Il y en a deux autres je crois ? Ceci dit, ça n’est pas forcément un bien que le premier soit le meilleur…
On est bien d’accord car le 2e, acheté dans l’enthousiasme de la lecture du 1er, je l’ai commencé deux fois et jamais terminé…
Tiens donc… Je note 🙂