L’obsession de James Renner

L'obsessionL’équipe de Sonatine + Fabrice Colin pour une nouvelle maison d’édition, c’est tentant. Surtout quand elle déclare d’emblée vouloir dénicher nos genres de prédilection aux confins des autres. Avec L’obsession de James Renner, c’est de thriller qu’il s’agit, thriller subtil, voire complexe. Le résultat est juste ébouriffant…

… et difficilement résumable. Disons que dans une première partie, tout se déroule comme dans un thriller des plus classiques et des mieux ficelés. Un homme inidentifiable est retrouvé assassiné dans sa maison d’ermite, phalanges coupées et passées au mixer. Un journaliste, David Ness, décide quelque temps plus tard de se consacrer à cette histoire. Pas n’importe quel journaliste : grâce à lui et à son roman, une erreur judiciaire a été révisée et le véritable meurtrier traduit devant la justice. C’est donc en reporter jadis efficace qu’il se consacre à ce dossier. Sauf que depuis quatre ans, David Ness n’est plus le même : peu de jours après la naissance de son fils Tanner, Elizabeth sa femme s’est enfuie de la clinique et s’est suicidée en voiture. Sa mort a eu lieu deux jours après le meurtre de l’inconnu de Primrose Lane. Coïncidence ?

Coïncidence n’est pas un mot qui fait partie du vocabulaire de James Renner. Car tout est millimétré dans L’obsession, calculé au détail près pour que tout s’emboîte au final. Mais avant ça, le lecteur basculera dans la science-fiction la plus scientifique dans son concept mais romanesque dans son utilisation. Et quand apparaît pour la première fois la grenouille géante armée de son bâton laser, il ne pourra que suspendre son incrédulité et continuer, continuer encore sa lecture. Car à l’image de David Ness, le lecteur est lui aussi possédé par cette histoire de meurtres : à plusieurs années de distance, des petites filles rousses disparaissent ou sont victimes de tentatives d’enlèvement. La sœur jumelle d’Elizabeth, l’épouse de David, a par exemple été kidnappée à l’âge de dix ans.

L’obsession est typiquement un roman pour cerveaux en vacances : il requiert toute l’attention du lecteur pour suivre les nombreux… disons personnages de l’intrigue. Il n’est cependant pas certain qu’il pourra un mois après raconter cette histoire de mémoire. Le plaisir de lecture n’en est pas moins intense. L’apport science-fictif démultiplie les possibilités narratives et traduit dans les faits cette obsession qui ronge David Ness : trouver qui s’en prend aux petites filles rousses et comment l’en empêcher. James Renner manie l’enchâssement des récits avec une maestria indispensable à la compréhension du roman et indéniable. La construction narrative s’avère aussi subtile que l’intrigue est retorse et prenante.

Voilà donc comment on fait du neuf avec le thème très rebattu d’un serial killer de petites filles : en y mettant un peu de SF.

Les liens de cause à effet sont complètement embrouillés à ce stade, je sais. Même moi, qui ai vécu la chose, je la comprends à peine. J’espère, à tout le moins, que tu finiras par réaliser que ce que nous appelons le présent n’est rien de plus qu’une question de perception.

James Renner sur Tête de lecture

L’obsession (The Man from Primrose Lane, 2012), James Renner traduit de l’anglais (américain) par Caroline Nicolas, Super 8 Editions, avril 2014, 576 pages, 22€

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