Il s’est écrit des dizaines de romans sur les Templiers, jusqu’aux plus délirants et ésotériques. L’héritier du Temple est différent car justement, il n’est ni délirant ni ésotérique. Il propose une vision historique et réaliste de cet ordre monastique et militaire à ses derniers jours, à travers le portrait de Jacques de Castelnou.
Jacques naît en 1270. Orphelin, il reçoit cependant une éducation de chevalier. Il devient très jeune chevalier du Temple et part pour Saint-Jean d’Acre, une des dernières places fortes chrétiennes en Terre sainte. Les Templiers se battent contre les mamelouks et attendent en vain l’aide des royaumes européens : plus aucun souverain de s’intéresse à la Terre sainte et le pape ne parvient pas à lever une croisade. Saint-Jean d’Acre tombe, les Templiers doivent fuir, Jacques de Castelnou est chargé de mettre à l’abri leurs dernières richesses, en particulier le Graal.
En 1294, Jacques de Molay est élu à la tête de l’ordre. Jacques voyage, envoyé pour proposer une alliance aux Arméniens et aux Mongols contre l’Islam pour reprendre Syrie et Palestine. L’opération sanglante est couronnée de succès mais oubliés par les royautés européennes, les Templiers doivent abandonner ce qu’ils viennent de reconquérir. Puis Jacques se fait mercenaire almogavre pour se venger de la trahison de Roger de Flor, ancien sergent templier devenu chef de ces guerriers sans scrupules.
On suit Jacques en Orient, puis de retour à Paris quand il échappe à l’arrestation de tous les membres de son ordre en octobre 1307 sur ordre de Philippe le Bel. On le suit encore dans sa retraite catalane, toujours emportant avec lui la dernière richesse des siens : le Graal, ou ce que certains pensent être le Graal. Il n’en est pas sûr lui-même, mais il obéit, c’est ce qu’il fait de mieux, en plus de se battre, c’est d’ailleurs pour ça qu’on l’a choisi pour d’importantes missions : Jacques est un « pauvre soldat du Christ » loyal, intègre, à jamais lié au Temple.
Ce que L’héritier du Temple décrit, ce sont donc les dernières années de l’ordre à travers un de ses tout derniers loyaux combattants. On pourrait reprocher à Jacques d’être trop parfait, le chevalier idéal et sans faille, mais ce point de vue permet à José Luis Corral d’embrasser pleinement l’idéal de l’ordre, de le décrire de l’intérieur. Autre très grand avantage du roman : pas de psychologie. L’auteur en reste principalement aux faits, ne cherche pas à transmettre au lecteur les profonds tourments de son héros. Et c’est tant mieux car rien n’est plus ridicule que la modernisation. Il est toujours très risqué de chercher à transmettre au lecteur moderne les pensées d’un homme ayant vécu il y a sept cent ans. José Luis Corral s’en tient donc à l’Histoire, imaginant avec intelligence et parcimonie ce qu’a pu penser le porteur du Graal.
Il nous épargne également nombre de divagations sur les richesses du Temple et le fameux trésor, derniers écrits du Christ ou cinquième évangile. Le mot d’ordre est à la sobriété, c’est ce qui fait de ce roman une réussite.
L’héritier du Temple
José Luis Corral traduit de l’espagnol par Anne-Carole Grillot
HC Editions, 2012
ISBN : 978-2-357-20095-1 – 477 pages – 22 €
El caballero del Templo, parution en Espagne : 2006
Le sujet est malheureusement l’objet de nombreuses production splus ridicules les unes que les autres… je retiens ce titre-là parce que j’aime les histoires de chevaliers pas ésotériques 🙂
Oh oui, et je crois que les Américains sont spécialistes en la matière… Mais là, c’est du sérieux 😉
Tout de même, il ne manquerait pas un peu d’ésotérisme là dedans ?!
Ceux qui en cherchent pourront être déçus…
Bonsoir Sandrine, pourquoi pas? Je le note. Bonne soirée.