Temps glaciaires de Fred Vargas

Temps glaciairesUne île islandaise maudite, un sanglier prénommé Marc et un hypothétique descendant de Robespierre : tels sont quelques-uns des acteurs de Temps glaciaires, le tout dernier roman de Fred Vargas, quatre ans après le précédent. Ses lecteurs impatients seront probablement comblés par cette nouvelle enquête du commissaire Adamsberg de la brigade criminelle du 13e arrondissement de Paris.

Tout commence par une vieille dame, Alice Gauthier, qui avant de mourir cherche à soulager sa conscience en écrivant une lettre à un jeune homme, Amédée Masfauré. Bientôt, la vieille dame est retrouvée morte, de même que le père d’Amédée. Si un mystérieux signe n’accompagnait les deux cadavres, on croirait à des suicides. Bientôt un troisième suicidé est découvert, avec le même signe.

Masfauré père était un homme richissime, sorte de savant philanthrope. Dix ans auparavant, il a entrepris un voyage en Islande avec sa femme et son secrétaire Victor. Tous trois rencontrèrent sur place d’autres Français avec lesquels ils restèrent coincés sur une île brusquement saisie par la brume. Pendant quinze jours, le groupe de touristes fut terrorisé par un homme très violent qui tua deux d’entre eux, dont la femme Masfauré. Officiellement, les victimes sont mortes de froid ; le tueur menace les survivants de revenir les tuer eux et leur famille si quiconque affirme le contraire. Or, Alice Gauthier se trouvait aussi sur l’île maudite…

Cette piste du tueur décimant ses anciens compagnons de voyage est bientôt battue en brèche par une autre : la police reçoit une lettre du président de l’Association d’Étude des Écrits de Maximilien Robespierre : les trois victimes en étaient membres et il craint pour la vie des autres. Voilà donc Adamsberg et les siens assistant à des séances reconstituées de l’Assemblée Nationale pendant la Révolution, avec costumes et conviction. Les participants poussent l’interprétation à la perfection, l’homme incarnant Robespierre trouble même par son réalisme. Qui dans l’association aurait intérêt à semer la Terreur parmi ses adeptes ?

La piste islandaise et la piste révolutionnaire vont semer la discorde dans la brigade, Adamsberg accusé de poursuivre des chimères plutôt que d’agir concrètement. Même son fidèle Danglard s’oppose à lui.

Nombreux sont les auteurs de romans policiers qui ont ces dernières années décidé d’en finir avec leurs enquêteurs récurrents : exit Charles Resnick, John Rebus ou Kurt Wallander. Fred Vargas continue elle avec son Jean-Baptiste Adamsberg sur un vieux modèle rassurant : l’enquêteur quasi seul contre tous continue sa quête contre vents et brume islandaise. On assiste même à une scène qu’on croyait éculée : son obstination couronnée de succès, Adamsberg réunit tout son monde pour expliquer par A + B comment il est parvenu à ses fins. Comme Hercule Poirot…

L’intrigue est si embrouillée qu’il serait prétentieux de dire qu’on en perçoit le dénouement avant la fin. Ce qui est certain d’emblée, c’est que répondant à de vieux schémas, elle reste prévisible dans ses articulations : oui, Adamsberg a raison de s’obstiner, de réfléchir et réfléchir encore, de gratter là où ça le démange comme dit son voisin Lucio.

Comme dans L’armée furieuse, Fred Vargas prend à l’évidence plaisir à intégrer des éléments historiques dans une intrigue contemporaine. Le tout assaisonné d’une pointe de fantastique et sans trop d’invraisemblances ou de facilités comme ça a pu être le cas dans d’autres romans. On a quand même un peu de mal à imaginer qu’un commissaire de police aujourd’hui ne connaisse Danton que de nom et n’ait jamais entendu parler de la famille Sanson ni de Camille Desmoulins… Tout ça pour que Danglard puisse étaler ses incroyables connaissances…

Là où Fred Vargas excelle toujours, c’est dans l’équipe qu’elle a créée. Car ce n’est pas au seul Adamsberg que s’attache le lecteur, mais bien à toute sa brigade qu’il retrouve avec un plaisir renouvelé, de même que les personnages secondaires comme Zerk ou Lucio.

Fred Vargas sur Tête de lecture

Temps glaciaires

Fred Vargas
Flammarion, 2015
ISBN : 978-2-0813-6044-0 – 489 pages – 19,90 €

53 commentaires sur “Temps glaciaires de Fred Vargas

  1. Tu ne sembles pas super enthousiaste. Peut-être vais-je m’en tenir à mon idée première : relire les premiers de Fred Vargas, que j’avais beaucoup aimés…

    1. Pars vite et reviens tard et Debout les morts m’ont beaucoup plu. Après, j’ai été plutôt déçue par ce que j’ai lu de Fred Vargas. Mais je dirais que Temps glaciaires est meilleur que Sous les vents de Neptune par exemple car il y a beaucoup moins d’invraisemblances et de facilités.

    1. Je n’ai pas tout lu mais il me semble aussi que les premiers étaient les meilleurs. Celui-ci est pas mal, sans être ébouriffant…

    1. Ah, je reconnais ce petit frisson qui fait qu’on s’inquiète toujours quand on aime : le charme va-t-il encore fonctionner ? Je te le souhaite, bien sûr.

    1. Entendre parler d’un auteur dont j’ai apprécié un livre me donne très souvent envie d’y retourner… puis ça passe 😉

    1. Je soupçonne les détracteurs de ne pas s’exprimer 🙂
      En tout cas, s’il y a quelque chose de particulièrement réussi dans ce roman-ci, ce sont bien les premières pages, avec la vieille Alice essayant d’aller poster sa lettre avec son déambulateur…

    1. Tous vraiment ? Tu as lu Sous les vents de Neptune ? Je l’ai trouvé vraiment mauvais, très en-dessous de Pars vite et reviens tard qui m’avait scotchée.

      1. Je ne suis pas sûre d’avoir tout lu, mais j’ai aimé ceux que j’ai lus ! 😉 Même Sous les vents de Neptune, me semble-t-il.

  2. J’aime beaucoup les Vargas, j les ai tous lus sauf l’armée furieuse mais j’ai hâte de lire celui-là : j’apprécie la présence de l’histoire dans ses énigmes policières…

    1. Alors là c’est une période plutôt méconnue, qu’on n’étudie pas vraiment à l’école, en tout cas pas en détail. ce qui peut éveiller la curiosité du lecteur mais aussi rebuter un peu…

  3. Je n’ai jamais lu Fred Vargas, juste vu des adaptations de ses livres. Si j’en trouve un dans un vide-grenier, je me laisserais peut-être tenter…

    1. Eh bien, j’appelle ça de l’enthousiasme plus que modéré : la vague Vargas ne semble pas t’avoir emporté…

    1. Disons que je n’ai pas vraiment étonnée, captivée, charmée par ce roman. Plus elle emberlificote son intrigue, plus on se demande comment elle va la désemberlificoter mais sans grande passion pour moi… J’espère qu’elle te tiendra en haleine !

    1. Je ne suis pas spécialiste non plus, mais je crois que personne n’a été déçu par Pars vite et reviens tard, alors je crois que je peux te conseiller ce titre pour la découvrir.

    1. Je n’avais pas trouvé l’intrigue captivante et surtout, j’avais découvert la clé de l’énigme avant la fin, ce qui est vraiment exceptionnel dans mon cas…

  4. Un avis qui a l’air mitigé, vu que je n’en ai lu qu’un et que je n’avais pas forcément aimé (sûrement un des moins bons), je ne me souviens même plus du titre… Je vais m’y remettre, mon ami en a pleins dans la bibliothèque.

  5. Très fidèle à elle-même apparemment..mais c’est une équipe qui sait toujours me divertir et j’aime ce côté obscur qui plane sur les enquêtes. Ce ne sera peut-être pas une priorité mais je le lirai à l’occasion.

  6. Je n’en ai lu qu’un (il y a 3 ans et j’ai oublié le titre, ce n’était pas avec Adamsberg) et je n’avais pas du tout aimé ! Et ce n’est pas sa prestation d’hier soir à LGL qui va me donner envie de la lire… Plus tard peut-être…

  7. Bonjour Sandrine, je ne l’ai pas encore lu mais je ne manquerai pas de le faire. Je note que Mme Vargas a changé d’éditeur (ceci n’ayant rien à voir avec cela). Bonne après-midi.

  8. Je n’ose pas trop te lire, ce Vargas est dans ma PAL et a priori, je ne devrais pas trop tarder à m’y plonger.:-) J’ai essayé de glaner si tu étais enthousiaste mais a priori il y a quelques bémols. Bon, je ne m’attends pas à être transcendée, épatée, mais je devrais quand même passer un bon moment de lecture je pense.

  9. Bonsoir Sandrine, heureusement que 100 pages avant la fin, l’action démarre enfin car les 400 premières m’ont paru longues. Bonne fin d’après-midi.

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