Clovis est un ancien journaliste qui s’est mis au vert près de Marseille. Il vit bien, loin de l’agitation du monde. Mais un jour, Samia vient frapper à sa porte pour lui demander son aide. Avec elle, c’est tout un passé qui revient : il a jadis aimé cette femme brisée, violée, mais s’est effacé devant l’amour qui son ami François lui portait aussi. Et c’est justement parce que François a disparu que Samia vient lui demander son aide.
François Maréchal, journaliste lui aussi, a été contacté par un confrère espagnol affirmant avoir mis la main sur un scoop : deux morts classées accidentelles sont en fait des meurtres commandités par ceux qui ont tout intérêt à ce que ne ressurgisse pas le scandale des bébés volés.
Voilà Clovis qui part à Barcelone sur les traces de son ami et d’enfants disparus depuis plusieurs dizaines d’années. Sous la dictature franquiste, et encore bien après, de nombreux nouveau-nés ont été arrachés à leurs parents : on les déclarait morts sans possibilité de voir les corps. Ils étaient ensuite confiés, contre de grosses sommes à de riches familles proches du pouvoir. Pour la plupart en grandissant, les enfants n’ont rien su. Ils sont aujourd’hui nombreux en Espagne à se lancer sur les traces de leur passé falsifié.
Le lecteur suit donc Clovis dans les rues hivernales de Barcelone qu’il aime tant. Il suit aussi partiellement, via un dossier retrouvé, l’enquête de François, lui-même enfant adopté. Mais pour lui, il ne s’agit pas des enfants volés du franquisme, mais de la fabrication à grande échelle d’enfants racialement purs. François est né pendant la Seconde Guerre mondiale d’un cauchemar aujourd’hui étouffé par le silence.
Belle découverte à la fois des éditions Jigal et de Maurice Gouiran grâce à L’hiver des enfants volés qui traite donc du trafic d’enfants organisé en plus haut lieu. Si on connait l’existence des lebensborns, on s’attarde rarement sur le sort de ces enfants après la guerre. De même, le vol de nouveau-nés républicains sous le franquisme est connu, ce qui l’est moins, c’est sa persistance après la mort du dictateur.
Maurice Gouiran construit sur ces périodes difficiles un roman noir qui travaille aussi profondément les faits que la matière humaine. Malgré la gravité des sujets traités, le roman ne manque pas d’un certain plaisir de vivre décliné au gré de quelques bons vins et d’une agréable sensualité.
L’hiver des enfants volés
Jigal (Jigal Polar), 2014
ISBN : 979-10-92016-19-2 – 237 pages – 18.50 €
Ouf, il y a un peu de douceur dans ce roman.
Oui, il y a l’amitié, une certaine nostalgie amoureuse, les plaisirs gastronomiques…
je lirai ce livre c’est certaine le sujet me convient tout à fait , est-ce vraiment un polar?
Eh bien oui, à mes yeux en tout cas, il y a une enquête menée par ce journaliste.
Je connais les éditions Jigal depuis un moment qui fait un boulot formidable avec des auteurs français. J’ai redécouvert Maurice Gouiran avec le même roman que toi (je l’avais lu et moyennement aimé dans un autre plus ancien) et depuis, j’en ai lu d’autres tout aussi bons
J’ai lu beaucoup de bien sur pas mal de blogs sur cet éditeur, et me voilà donc franchissant le pas. Typiquement l’exemple d’un éditeur dont je n’ai jamais entendu parler ailleurs que sur les blogs. J’ai compris que le Clovis de Maurice Gouiran était un personnage récurrent et qu’il se rendait souvent en Espagne : ça me va, je l’y retrouverai certainement.
Tu as des lectures très intéressantes. Je le note.
le papou
Quand je les choisis, j’essaie de piocher dans ce qui a priori me plaira. Parfois je ne choisis pas, mais je ne parle alors pas de mes déceptions (lu dans un cadre plus ou moins professionnel). Certains livres ne méritent qu’un « bof », alors je passe à autre chose 😉
C’est une très bonne maison d’éditions. Tu me tentes beaucoup
Si tu apprécies déjà cet éditeur alors ce roman te plaira certainement.
Voilà une maison d’édition dont je lis beaucoup de bien (notamment chez Yves), en plus si ça se passe en Espagne, je le note.
Je retiens, j’ai lu un livre de Gouiran il y a quelques années que j’avais beaucoup aimé.