Nous sommes à Bruxelles après les ravages causés par une troisième vague de virus Ebola. On n’est pas loin de l’anarchie et pour survivre, Roxanne trafique des médicaments, des faux et des vrais et n’envisage guère l’avenir si ce n’est de façon funeste. Mais voilà qu’un avocat la contacte pour lui signaler que sa fille Stella abandonnée à la naissance, est désormais orpheline de père et qu’elle va devoir s’en occuper, à moins de la placer dans un centre pour enfants. Roxanne, qui ne s’est jamais sentie mère, accepte de s’occuper de l’enfant quasi mutique et l’installe dans son appartement.
Et là, je me suis dit qu’on allait avoir droit aux remords de la mère qui s’en veut d’avoir abandonné son enfant et qui fait tout pour la sauver et au final, être mère, ah c’est fantastique ! Et heureusement, je me suis trompée : je fuis ce genre de romans sirupeux. Roxanne est vraiment une dure à cuire et Stella une enfant très particulière.
Le roman prend un premier virage quand Stella décide de quitter Bruxelles, sa violence et ses fanatiques religieux de toute tendance pour rejoindre une maison de famille à la campagne. Le retour à la terre, on connaît en matière de post-apo. Installation donc loin du monde, près des péquenots et c’est dur de creuser la terre pour la faire fructifier…
Second virage, bien plus original quand Stella et Roxanne se rendent compte qu’elles ne sont pas seules dans la maison. Comme mère et fille ne communiquent guère, elles ne partagent pas leur ressenti et le lecteur s’interroge sur la nature de cette présence.
Qu’un livre soit surprenant est un atout. On lit aujourd’hui tellement de romans catastrophes (et catastrophiques !) sur la fin de la civilisation qu’un peu d’originalité est appréciable. Je trouve cependant le roman d’Emmanuelle Pirotte un peu lent : après l’installation dans la maison de famille, l’intrigue se traine. Et surtout, on perd un peu de vue Roxanne, au profit de son énigmatique fille et de la présence désincarnée qui les observe. Ce fantôme, disons-le, se remémore son passé de façon qui m’a semblé assez artificielle. Ce qu’on aprrend de lui ne se rattache en rien à la situation de départ (ville en crise, virus, violence). Emmanuelle Pirotte développe une histoire d’amour certes originale (la fin est bien trouvée) mais dont le récit manque de dynamisme.
Je m’étonne par ailleurs que Le Cherche-midi présente ainsi ce roman : « Entre dystopie et conte fantastique, De profundis est un roman hors normes. » Ce roman n’est pas une dystopie, il s’apparente plutôt au post-apocalyptique ou à la fin du monde puisque la population disparait à la vitesse grand V et que le monde connu (l’Europe) retourne à la sauvagerie d’avant la civilisation. Une dystopie est une contre-utopie, rien à voir ici. On pourrait utiliser le mot « anticipation » s’il n’était terriblement fourre-tout…
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De profundis, Emmanuelle Pirotte, Le cherche-midi, août 2016, 285 pages, 17€