En février 2016 sortait le film Les Innocentes d’Anne Fontaine. Il raconte l’histoire d’une jeune médecin française de la Croix Rouge qui au sortir de la Seconde Guerre mondiale vient en aide à des religieuses polonaises. Celles-ci, violées par des soldats soviétiques, sont enceintes. Ce film se base sur un épisode de la vie de Madeleine Pauliac qui a réellement existé et dont le neveu, Philippe Maynial, retrace ici la vie durant la guerre. Il souhaite en effet faire un portrait plus global de sa tante depuis son arrivée à Varsovie au printemps 1945 jusqu’à sa mort en février 1946. On peut lire une interview sur le site de l’éditeur.
Lorsqu’elle décide de partir pour la Pologne, Madeleine Pauliac a déjà un profil exceptionnel : femme médecin et résistante de la première heure, elle a affronté pénuries et dangers, participé aux combats de la libération de Paris et même rencontré le général de Gaulle. L’Europe est en partie libérée mais il reste à l’est de nombreux français : prisonniers, travailleurs du STO, Malgré-nous engagés de force dans l’armée allemande, engagés volontaires… Madeleine, alors « lieutenant de santé » est choisie pour diriger les opérations de rapatriement. Elle est aidée dans cette mission par un groupe de jeunes femmes aussi dévouées qu’elle et qu’on appelle l’Escadron bleu en raison de la couleur de leur uniforme.
Ces femmes vont sillonner la Pologne de camp en camp pour récupérer les Français. Il faut faire vite car le rideau de fer est en train de s’abattre sur la Pologne. Les Soviétiques imposent leurs règles (au détriment du gouvernement légitime toujours en exil à Londres) sans que les Alliés s’en émeuvent : il ne faut pas contrarier le camarade Staline, surtout pas pour un pays comme la Pologne… Faire vite donc avant que les Français ne soient expédiés vers nulle part et qu’on n’entende plus jamais parler d’eux (la France étant un pays vaincu par l’Allemagne). Mais les obstacles sont nombreux car les Soviétiques ne veulent pas laisser partir qui que ce soit.
Le plus grand danger pour ces jeunes femmes vient des soldats soviétiques déchaînés : toutes les femmes qui croisent leur chemin, de l’enfant à la vieillarde, sont violées. On leur a dit de venger la patrie, de se servir sur l’habitant, de se faire payer les terribles années de guerre. Aucun scrupule, aucune compassion, « ce sont des animaux » dit la population. Face à ces animaux, une dizaine de femmes réparties en cinq ambulances qui cherchent à leur voler leurs Français. Dire que la situation est dangereuse est on ne peut plus en-dessous de la vérité. Cependant le docteur Madeleine Pauliac et son escadron n’hésitent jamais. C’est par exemple en quasi les kidnappant qu’elles parviennent à récupérer les blessés français de l’hôpital russe de Bialystok. Elles ont besoin de tout leur courage pour soigner les blessés de Dachau et ceux du camp de Majdanek où les Juifs du ghetto de Varsovie ont été déportés.
Cet ouvrage est clairement un exercice d’admiration : comment pourrait-on ne pas admirer ces femmes qui risquent tout pour les autres ? Madeleine Pauliac a été un moteur, un lien entre elles toutes, elle fut à l’évidence admirable. Leur amitié s’est poursuivie sans elle tant ces mois passés en Pologne sont une très grande aventure humaine que Philippe Maynial met en exergue. Il souligne aussi beaucoup la dévastation de la Pologne ainsi que l’abandon des Alliés. Le pays est sacrifié pour complaire à l’ami Staline. Après les difficiles années de guerre, c’est une période bien pire qui s’ouvre pour les Polonais : les soldats soviétiques fous furieux ne sont que l’avant-garde des exactions à venir.
Madeleine Pauliac, l’insoumise complète très bien le portrait esquissé par le film d’Anne Fontaine. Je l’avais beaucoup apprécié, aussi parce qu’il traitait avec délicatesse de la difficile question des religieuses violées et donc des rapports de l’Église (polonaise) et des femmes. Cet ouvrage de Philippe Maynial relève de l’hagiographie, en toute légitimité, mais il est aussi précieux pour qui s’intéresse au contexte de la toute fin de guerre et à l’histoire de la Pologne.
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Madeleine Pauliac, l’insoumise
Philippe Maynial
XO, 2017
ISBN : 978-2-84563-886-0 – 282 pages – 19,90 €
J’ai beaucoup apprécié moi aussi le film d’Anne Fontaine, mais je ne m’étais pas penchée à l’époque sur l’histoire de cette infirmière. Je vois qu’elle est morte pas longtemps après. Une lecture que je n’hésiterai pas à faire si je la trouve à la bibli. (ou en poche plus tard).
Une mort accidentelle et complètement idiote… Le film se focalise sur les religieuses mais cet épisode est assez court dans ce livre.
J’ai vraiment aimé ce film… du coup, je suis tentée mais j’ai peur de l’exercice d’admiration…
Comment ne pas l’admirer… c’est sa tante en plus, il a de quoi être fier !
Je ne connais ni cette femme, ni le film. Merci pour cette découverte.
Un contexte très intéressant, mais le terme « hagiographie » suffit à me faire fuir. Dommage.
Oui mais c’est supportable car indéniable… Comment ne pas dire qu’elle était déterminée, courageuse, admirable… comment ne pas la saluer ? Cette femme avait sans doute des défauts, mais à côté de ce qu’elle a vécu… Je me doutais en l’ouvrant de la tonalité de l’ouvrage, j’ai pris surtout les infos qu’il donnait.
J’ai entendu parler du film que je regarderai à l’occasion. Je note aussi le livre.
Je me souviens de la bande annonce de ce film. Je ne l’ai pas encore vu et le livre me tente terriblement !