Le retour de Bernhard Schlink

Le retour de Bernhard SchlinkEcrire sur l’Allemagne aujourd’hui, est-ce écrire sur le passé ? Les Allemands nés après la Seconde Guerre mondiale peuvent-ils se défaire de l’Histoire comme d’un vêtement trop encombrant ? Dans Le Retour de Bernhard Schlink, le passé est omniprésent parce qu’il est une clé qui ouvre toutes les portes et permet de comprendre les individus. Il est donc nécessaire de comprendre d’où on vient.

Peter Debauer, narrateur et fils unique d’une mère célibataire, se souvient de ses vacances d’enfant chez ses grands-parents paternels en Suisse. C’est chez eux qu’il écrit au dos de jeux d’épreuves de romans édités par le vieux couple. Plus tard, il se met à lire les fragments d’un exemplaire qui raconte le retour au bercail d’un soldat allemand prisonnier des Russes : de retour chez lui, celui-ci trouve sa femme mariée à un autre homme et mère de deux enfants.

Plus tard encore, le narrateur reconnait dans sa ville natale l’immeuble décrit dans le roman. Il frappe à la porte de l’appartement qu’il pense correspondre à la description et rencontre Barbara, qui deviendra épisodiquement sa compagne. Dès lors, Peter Debauer ne cessera plus de chercher à en savoir plus sur ce soldat. A force de petites annonces et de recherches, il découvrira le passé nazi d’un certain Volker Vonlanden, parfois appelé Walter Scholler, et pourquoi pas John de Baur, universitaire américain…

La quête qui structure l’intrigue de ce roman souffre d’une narration éparpillée et de retournements qui n’en sont pas. Le lecteur ne met pas longtemps à comprendre quels points communs lient Volker Vonlanden et le père prétendument mort du narrateur. De même, lors du séminaire final, Peter et ses compagnons ne comprennent pas ce que le lecteur comprend très rapidement. Ce qui bien sûr décrédibilise les personnages. Pour ces raisons et d’autres, la trame narrative de ce roman ne m’a pas convaincue.

A l’inverse, les thèmes traités dans Le Retour de Bernhard Schlink suscitent intérêt et questionnements, même s’ils ne sont pas nouveaux. Ces Allemands que nous côtoyons aujourd’hui, qui étaient-ils pendant la guerre, qu’ont-ils fait ? Est-il possible après la guerre de devenir quelqu’un d’autre ? Le droit et la justice dépendent-ils du régime politique dans lequel on vit ou existe-t-il un principe de Bien universel ? Nous, êtres civilisés loin de tout conflit et fiers de nos principes, sommes-nous capables de violence, d’égoïsme, de tromperie ?  La morale enfin nous tient-elle lieu de vernis prêt à craquer au moindre vacillement ?

Après Le Liseur et son succès international, Bernhard Schlink revient sur le passé trop présent de son pays, sur l’incommunicabilité entre les générations, le nécessaire silence qui se heurte au besoin de savoir. Sur le besoin de fiction aussi, la nécessité d’écrire toujours la même histoire, celle de l’après-guerre qui dure, du retour qui n’en est pas un  quand on ne veut pas rentrer.

J’aurais certainement plus apprécié ce livre s’il n’avait été si compliqué et détourné. Certains épisodes de la vie de Peter m’ont semblé monotones, si ce n’est superflus. De même qu’on comprend, d’un point de vue symbolique, l’épisode de la réunification, il s’insère mal dans l’économie du récit. En bref, l’intrigue sert mal le propos.

Bernhard Schlink sur Tête de lecture
 
Le retour

Bernhard Schlink traduit de l’allemand par Bernard Lortholary
Gallimard (Folio n°4703), 2008
ISBN : 978-2-07-035539-6 – 402 pages – 8.40 €

Die Heimkehr, parution en Allemagne : 2007

16 commentaires sur “Le retour de Bernhard Schlink

    1. J’ai vraiment eu l’impression que l’auteur cherchait à faire compliqué. Ça donne un texte peu « naturel » (si on peut dire ça pour une oeuvre littéraire) à mes yeux.

  1. J’étais un peu mitigée aussi à la lecture de ce roman, dont certains aspects m’ont plu et d’autres moins… L’histoire du roman dans le roman est peut-être un peu longue (dans mon souvenir assez vague)

  2. J’ai tellement aimé le Liseur que je n’ai jamais osé lire un autre titre de cet auteur. Et d’après ton billet, ce n’est pas avec celui-ci que je continuerai…

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