Oliver ou la fabrique d’un manipulateur s’ouvre sur une scène choc : Oliver, narrateur du premier chapitre explique qu’il vient de frapper sa femme Alice qui gît à ses pieds. Jamais il n’avait levé la main sur elle auparavant. Comment en est-il arrivé là, c’est tout le propos du roman.
Plusieurs narrateurs prennent alternativement la parole, dont Oliver lui-même, pour construire un portrait de plus en plus précis. Aucun n’affirmerait qu’il est un monstre, c’est peu à peu qu’il se révèle d’où le titre original Unraveling Oliver, beaucoup plus pertinent. Car Oliver n’est pas un manipulateur, c’est un menteur et un lâche, pas assez intelligent pour manipuler le monde. Mais Oliver est-il né sociopathe ou la vie s’est-elle chargée de le rendre mauvais ?
C’est un écrivain qui publie sous le pseudonyme de Vincent Dax des romans jeunesse à succès. Alice, sa femme depuis vingt ans, en est l’illustratrice. Elle est effacée, peu exigeante, on pourrait dire soumise alors qu’il est suffisant, autoritaire et bel homme. Mais jamais violent. Il ne veut pas d’enfant, n’a pas de famille, a été mis en pension très jeune et y a grandi. Il affirme ne pas avoir de parents. Ceux qui tour à tour parlent de lui ne lui en connaissent pas. Le ton froid sur lequel il raconte son enfance solitaire laisse affleurer le traumatisme. Un autre épisode achève de le faire basculer du côté des insensibles au cours d’un été de vendanges dans le Bordelais.
Liz Nugent pour son premier roman aborde des sujets intéressants qu’il serait dommage de dévoiler puisqu’ils font partie du suspens. Le principal est l’origine du Mal : naît-on ou devient-on mauvais ? Il n’y a cependant pas grand-chose de vraiment surprenant dans la construction de ce sociopathe. Le portrait se dessine lentement sans suspens prenant, couche après couche. C’est construit mais uniforme car les personnages semblent absents : leurs voix sont autant de témoignages monotones, quasi dénués d’émotions. Or, c’est Oliver qui est censé ne pas éprouver de sentiments, pas eux.
Dans une interview, Luz Nugent fait allusion au livre de John Banville, Le Livre des aveux comme source d’inspiration : un narrateur meurtrier s’y confie. Oliver ou la fabrique d’un manipulateur n’a pas cette envergure, en grande partie à cause de la faiblesse des autres voix. Le roman de Banville est bien plus subtil.
Ce premier roman irlandais n’est pas le suspens que j’attendais : les personnages ne sont pas assez fouillés et leurs voix trop uniformes. Rien de désagréable à lire cependant.
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Oliver ou la fabrique d’un manipulateur
Liz Nugent traduit de l’anglais par Edith Soonckindt
Denoël, 2015
ISBN : 9782207118740 – 256 pages – 20,50 €
Lu il y a plusieurs années et j’avoue n’en avoir gardé aucun souvenir ! Apparemment, en relisant mon billet, j’ai bien aimé même si, comme toi, je notais l’erreur de traduction du titre en français et une construction somme toute très classique.
Bof, bof, tu n’es pas assez emballée pour que je note.
ça sent la sortie de (vieille) PAL, ça ! J’espère que tes prochaines lectures te plairont davantage !
Non non, c’était une lecture électronique : j’ai nettoyé et trié ma liseuse pour la prêter et je suis tomber sur ce titre dont je ne me souvenais pas du tout, alors j’ai tenté ce premier roman irlandais…
Intéressant mais pas incontournable donc. Je regarderai de plus près le livre de Banville. J’aime quand c’est subtil.:)
Je te sens déçu par le ton uniforme.
Dommage pour ce roman, c’est pourtant un thème qui aurait pu m’intéresser mais je sens que tu n’es pas emballée.
Je crois que tout simplement, je m’attendais à autre chose, un vrai suspens psychologique…